Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/247

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— Tout change, dit le comte, les enfants seuls ne changent pas ; ils ont un type, un caractère ; combien de fois n’aurait-on pas dû dans les assemblées écouter la voix des enfants, plutôt que celles de leurs pères ?

La comtesse était inquiète, elle demanda comment ces lueurs pouvaient être des feux de la Saint-Jean ; elles étaient si grandes, et flambaient si haut, qu’il fallait que les enfants brûlassent des granges pleines de paille et des quartiers de forêt.

Le comte attribua cet effet à la rosée, à travers laquelle un feu éloigné paraît plus fort qu’il n’est réellement. Mais lorsqu’ils virent un château voisin, qu’ils apercevaient très-bien de chez eux, prendre feu tout d’un coup ; lorsqu’ils entendirent des cris dans le lointain, le tocsin qui sonnait de tous côtés ; lorsqu’ils virent leurs domestiques qui les quittaient, Melück ne put plus leur cacher ce que depuis une heure elle n’avait pas le courage de leur dire : ils étaient condamnés à périr !

— Ah ! Melück, s’écria la comtesse, pourquoi n’avons-nous pas été avec toi nous réfugier dans ton pays !

— Non, dit le comte, j’aime mieux mourir dans l’ancienne résidence de ma famille, que de languir dans l’exil, sans pouvoir jeter un regard à ma pa-