Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/320

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

il va me recevoir dans son immensité, moi, le plus jeune enfant comme il a reçu le premier-né, tous dans une égale félicité.

Bientôt ses paroles devinrent de plus en plus confuses, ses lèvres remuèrent encore un peu. Les Juifs disent que l’eau trouvée dans la chambre d’un individu mort d’une maladie violente est dangereuse, et le plus souvent mortelle. Ils le portèrent dans la maison du lieutenant, et répétèrent ce qu’il leur avait raconté. Le cousin leur assura que le jeune homme était malade depuis longtemps, et appela le médecin que, le premier jour, l’héritier du Majorat avait vu assis dans sa voiture comme la Mort, et conduisant ses deux chevaux, qu’il avait pris pour la faim et la douleur. Ce dernier haussa les épaules, employa la lancette, les ventouses et autres moyens violents ; mais il ne put troubler l’immobilité du malheureux, il ne fit qu’accélérer sa mort.

Le soir, le lieutenant prit possession du Majorat, et passa sa première nuit de bonheur dans le lit d’honneur de l’hôtel. Sa brillante livrée et son luxe de bon goût firent l’admiration générale, lors de l’enterrement de l’héritier du Majorat. Il donna plusieurs grands dîners. Il ne se passait pas une semaine qu’il n’y eût fête chez lui, et chacun s’étonnait