Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/51

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rissées ; il en était de même sur les parties de son corps où il en était tombé quelques graines. Bella pensa qu’il demandait à manger, et elle était très embarrassée de savoir ce qu’elle lui donnerait : comment se procurer du lait ? Après quelque temps de réflexion elle se souvint d’une chatte qui avait mis bas dans le grenier : ravie de cette trouvaille, elle alla chercher les chatons, et les plaça dans le berceau avec le petit homme-racine qui la regardait déjà d’un air malin ; la chatte vint bientôt rejoindre sa progéniture ; mais il arriva que les infortunés aveugles furent trompés par leur nouveau camarade qui, voyant clair de tous côtés, épuisait avant eux la provision de la mère, sans que celle-ci y fît attention.

Bella, à genoux auprès du berceau, regardait pendant des heures cette ruse de son petit homme. En le voyant tromper ainsi les autres, elle lui trouvait une grande supériorité, et, en remarquant comme il savait éviter leurs griffes, elle admirait sa prévoyance et sa prudence. Mais ce qui lui plaisait le plus dans cet être, c’était les yeux qu’il avait à la nuque. Il la comprenait déjà lorsqu’elle lui faisait signe du regard, qu’un des petits chats était tombé de sa place, car aussitôt il s’y mettait jusqu’à ce que l’autre fût revenu.

Leur affection s’accrut si vite, qu’elle s’affligeait à