Page:Achim von Arnim - Contes bizarres, Lévy frères, 1856.djvu/82

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

lavée et frisée, avait pris une mine pleine de dignité et elle avait l’air d’une vénérable gouvernante ; car, au premier coup d’œil, on reconnaissait qu’elle n’était pas la mère de Bella. La coquetterie se réveilla bientôt chez les deux femmes, et aussitôt qu’elles eurent mis leurs riches vêtements, elles allèrent s’admirer complaisamment dans la glace.

Quant au feld-maréchal, la mère Nietken n’en pouvait pas faire grand-chose ; elle avait beau lui arranger, lui tailler, lui peigner son épaisse chevelure, il n’en gardait pas moins son visage comprimé, ses épaules courbées, et sa voix étouffée.

— Mon cher petit, lui dit la vieille, tu es un nain, bien certainement, ou je ne suis pas une honnête femme.

— Quoi ? répondit Cornélius, je suis un homme ! et vous m’appelez un nain, qu’est-ce que c’est qu’un nain ?

— Je n’en ai jamais vu, repartit la mère Nietken, mais tu m’as bien l’air d’en être un ; tu pourrais te montrer pour de l’argent.

— Je ne demande pas mieux, dit Cornélius.

Et il se mit à réfléchir à cette possibilité de pouvoir gagner ainsi de l’argent, très reconnaissant du moyen que la mère Nietken venait de lui indiquer.