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CES DAMES AUX CHAPEAUX VERTS

— Vous en jugerez, monsieur le Grand Doyen. Je broderai à votre intention la nappe, dont vous aurez vous- même inventé le modèle…

La conversation continue ainsi. Elle est si enjouée que les quatre vieilles demoiselles, ne se sentant pas au diapason, se taisent. Mais elles suivent, avec un même mouvement de tête, les phrases de M. le Grand Doyen, et sourient du même sourire aux mêmes répliques.

Pourtant Telcide a décidé de ramener les choses à son niveau :

— Monsieur le Grand Doyen, demande-t-elle, avez- vous quelques renseignements sur la mort de Mlle de Valincourt ?

— Oui, ma bonne demoiselle… Cette vénérable personne s’est éteinte alors que je lui administrais l’extrême-onction… Elle avait soixante-seize ans !…

— Ce n’est pas encore bien vieux ! soupire Telcide, pendant que Rosalie et Jeanne commencent de donner des renseignements biographiques et généalogiques sur Mlle de Valincourt.

Cela menaçant d’être long, M. le Grand Doyen, qui déteste perdre son temps, s’empresse de prendre congé.

Il est déjà dans le couloir que Jeanne lui parle de l’amiral de Valincourt, qui fit la conquête des Pays-Bas. Il a réussi à gagner la rue que Telcide lui énumère encore tous les titres du chancelier de Valincourt, qui a siégé aux Etats Généraux :

— Excusez-moi, murmure-t-il, j’aperçois là-bas M. l’abbé Grégoire. J’ai une communication urgente à lui faire…

Il se sauve. Il est sauvé !

— Pauvre chancelier de Valincourt ! dit Arlette avec un grand geste de désolation.

— Pourquoi plaignez-vous le chancelier ? demande Telcide.

— Parce que ce malheureux n’a peut-être acquis tous ses titres et n’a peut-être siégé aux Etats Généraux que pour vous permettre de le dire à M. le Grand Doyen… Et M. le Grand Doyen ne vous a même pas écoutée…