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CES DAMES AUX CHAPEAUX VERTS

— Pardon !

— Chancelier de mon cœur ! réjouissez-vous d’être mort… Cette désillusion vous eût tué !…

— Je ne vous permets pas de vous moquer ainsi…

Telcide est furieuse. Elle l’est contre Arlette, qui l’a ridiculisée. Elle l’est contre M. le Grand Doyen, qui a attaché une importance exagérée à une fillette mal élevée… Elle l’est contre elle-même parce que, sur le moment, elle n’a trouvé aucun mot affirmant son autorité.

Arlette, au contraire, dans la joie d’avoir fait admirer les petits pois de sa robe, a repris ses attitudes exubérantes de jadis. Elle danse sur un pied.

— Tenez-vous mieux, lui dit Telcide.

— C’est que je me sens très gaie, ma cousine. J’ai un besoin de faire des folies.

Telcide plisse le front :

— Je ne m’explique pas ce que vous entendez par le mot « folies ».

— Oh ! très simple !… Les folies ? ce sont les choses qu’on commet sans autre but que de s’amuser soi-même et d’étonner les autres.

— Je déplore la mentalité de ceux qui agissent de telle façon. Elle est piètre…

— Vous m’avouerez, ma cousine, qu’il vaut mieux faire des folies que d’aller au café.

— Aller au café ?… Qui va au café ?…

— Ou bien de passer sa vie à médire de son prochain…

— Pardon… pardon… Que voulez-vous insinuer ?

— Oh ! rien du tout… Ma discrétion s’opposerait à ce que j’insinuasse…

Les imparfaits du subjonctif font sur Telcide le même effet que le drap rouge sur le taureau. Elle a à peine entendu celui-ci que sa fureur éclate.

Rosalie, Jeanne et Marie s’interrogent des yeux. Doivent-elles intervenir ? Elles craignent de mécontenter leur sœur. Elles se décident à rester les témoins du drame :

— Vous avez le diable au corps, crie Telcide… Vous êtes une petite impudente… Mais je vous corrigerai… Vous plierez ou je vous briserai…