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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/121

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

imprudentes mouches s’embarrasser dans nos fils, dans ces liens. Certes, puisque ta bouche augustale a parlé, nous sommes des araignées hideuses, mais toi-même ne pourrais-tu pas te comparer à une araignée magnifique, à une araignée d’or, à une araignée d’escarboucles, si tu veux, mais à une araignée qui sut épuiser l’Autocrator Léon en lui suçant sinon le sang, du moins ce qui équivaut au sang…

Ainsi parlait Staurakios tranquille, sans que ses gestes fissent même bruire la soie de sa longue robe fauve.

Irène pensa l’étrangler. Elle voulut saisir dans ses mains les fanons de ce cou flétri, et sentir les veines gonfler, le larynx craquer sous ses doigts haineux. Cela l’eût soulagée, tant ses muscles et ses os voulaient agir, tendus, tels des ressorts d’arbalète, par les nerfs qui se contractaient encore. Mais elle se ravisa, préféra sourire, et se rasseoir épuisée, au fond du large trône froid. Dans le silence, les poitrines oppressées haletèrent.

— Qui donc,… reprit-elle…, qui donc battra les Sarrazins ? Lequel de vous réduira le César ; et lequel de vous dispersera les cavaliers du Khalife ?

— Il n’est pas besoin,… énonça Bythométrès,… que les Sarrazins soient vaincus. Daigne, ô Lèvres de l’Esprit, daigne écouter mon discours. Je soutiens que si l’un de tes généraux remporte une éclatante victoire sur les Infidèles, rien de plus terrible ne peut t’advenir, à toi et à l’Empire.