Aller au contenu

Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/323

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
297
IRÈNE ET LES EUNUQUES

Il faut que l’empire d’Orient et celui d’Occident s’épousent. Alors la guerre des siècles finira. J’ai conçu de faire Byzance assez belle pour que le Franc la demande en union. J’atteindrai ce but ; et ni ton cœur fragile, ni les instincts de mon fils ne prévaudront contre cela.

Elles restèrent silencieuses ; elles examinèrent leurs sincérités, jusqu’à ce que Marie tentât encore la compassion :

— Tu exiges que je brise mon sort, que je relègue au cloître mes désespoirs.

Irène, sans faiblesse, prononça :

— Je l’exige. Tu dois obéir si tu respectes ta promesse de chrétienne.

— Tu n’as donc jamais aimé, toi ; tu n’as donc jamais frémi de joie en désirant qu’une vie d’homme tremble dans ta vie ?

Irène baissait le visage, et se protégeait avec les plis de son manteau.

— Prends garde : tu touches à ma douleur.

Soudain, Marie espéra :

— Si tu as aimé, tu ne me condamneras plus !

— À moins que je ne me sois condamnée d’abord.

Irène fixait les yeux à terre pour ne point voir ni s’attendrir.

Et Marie, de toute son angoisse :

— Tu n’aimais pas, si tu t’es condamnée, ainsi que tu me condamneras !

— Ma fille !… ma fille !…

La mère, étroitement, étreignit sa bru.