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Page:Adam - Irène et les eunuques, 1907.djvu/51

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IRÈNE ET LES EUNUQUES

par les ébats voluptueux, Irène ne se reconnut point.

Elle adorait ce jeune homme accoudé près d’elle et qui l’avait étreinte si fougueusement, qui l’avait étourdie de caresses inimaginables, à la manière des dieux, à la manière des bêtes. Alors elle se railla d’avoir aimé Jean Bythométrès ; et elle conçut une honte singulière.

Pour se faire pardonner, sans le dire, cet amour criminel, elle voulut attirer dans ses bras fragiles, le prince déjà revêtu, par les gros eunuques Papias et Théophane, de sa tunique, déjà chaussé de ses souliers rouges par Pharès, déjà debout.

Mais la figure du jeune homme s’obscurcit. Ses sourcils noirs et touffus se froncèrent. Précipitamment, le flasque Théophane se prosterna vers l’oreille d’Irène, lui murmura :

— Ô Lumière du monde, Ta Sagesse a-t-elle oublié qu’il lui appartient de saluer, la première, l’Œil du Théos, Léon Basileus et fils de l’Autocrator Constantin, qui est l’empereur des Romains, le maître des terres et des mers, le chef souverain des Sept Églises… ? En vérité, Ton Illustre Sagesse aurait-elle oublié ce qu’elle doit à son maître ?

En même temps l’eunuque la recouvrait d’un lourd manteau cérémoniel ; il l’attirait au bas de l’estrade, afin qu’elle s’inclinât profondément vers la mosaïque où un lion d’or dévorait une antilope de lapis.

Irène sentit les feux de la honte rougir sa face, et la vigueur de ses nerfs se rebeller. Impassible, droit,