Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/25

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laissait la mère ou Céline le chercher par toute la pièce ; et n’appelait qu’à l’instant de leur inquiétude manifeste. De rire alors, triomphant. Une grande personne était, par sa ruse, trompée. Cette minute, il avait eu le sens de la suprématie.

Telle lui vint l’ambition première. Céline fut sujette et victime. Appelée chez madame, elle trouvait, au retour, les mailles du tricot sans aiguilles. Omer feignait gravement d’approfondir au moyen d’un clou les yeux du pantin, Denise somnolente derrière le guéridon à ouvrage, serait crue la coupable. Il en advenait ainsi. Alors le frère s’admirait. Le résultat était positif. Dans le coin, et le nez au mur, en punition, la sœur longuement pleurnichait à sa place.

Pour se couler, sans être aperçu, dans les chambres interdites, pour toucher aux choses délicates et précieuses qu’on défendait de son approche, Omer employait mille allures secrètes. Il rampait, se couchait, s’effaçait, glissait invisible, habile à reconnaître des minutes où la conversation absorbait les gens. Point de surveillance qu’il ne déjouât, moins avide peut-être, de dévorer le gâteau atteint sournoisement, que de se féliciter, l’ayant atteint. Maintes fois, avant de porter à sa bouche la friandise, il la montra, pour que sa mère ou Céline s’étonnassent bruyamment de la lui voir aux mains…

― Comment qu’t’as fait, dis donc ?… Il en a du vice, ch’tiot !

Les mines ahuries des gardiennes lui donnaient des joies d’orgueil intérieur.

Grimpé contre la fenêtre, il lui semblait ensuite que jamais il n’eut comme ce vieillard mis de travers la perruque sur un col crasseux. Ouvrir le parapluie lui eut coûté moins de peine qu’au valet, piétinant, sans les voir, les flaques qui l’éclaboussaient jusqu’en haut des bas bleus. L’enfant se moquait de tant de