Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/296

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des complots organisés par les agents provocateurs de M. Le chancelier Pasquier… Cinquante électeurs que vous perdriez, c’est-à-dire la majorité départementale passant aux libéraux, le chevalier de Vimy élu député, et votre destitution à la suite d’un pareiléchec…, Monsieur De Thauley !…

— À dieu ne plaise, madame, que je veuille ennuyer les vôtres !… je devais faire une perquisition ; elle est faite… Je sais qu’un cheval à demi fourbu vient de rentrer à l’écurie, et que votre neveu suivait ces messieurs à la maison de la Goguette… Je coucherai cela sur mon rapport. Que le ministre du roi y pêche ce qu’il veut ! Je m’en lave les mains, et vous donne le bonsoir.

Omer s’esquiva dans le corridor, pour n’être pas vu du visiteur qui sortait en ébauchant un dernier salut quelque peu sec. Au contraire, la tante Caroline fit une belle révérence à la française.

— Mon dieu ! faut-il que je répare jusqu’à ma mort les bévues des autres ?… Et toi, mauvais gredin, que je t’y reprenne à courir les routes en faisant le conspirateur !… Ça t’étonne que je t’aie tiré de là, hein ?… Si on n’avait pas ses ruses… Miserere mihi, Domine !

Elle avait donc vaincu l’autorité du tyran, la grosse tante qui fleurait le poivre, le pain d’épice et le tabac à priser répandu entre les plis du spencer, qui traînait des savates en drap mou, qui répétait des ordres grognons aux dix servantes, vieilles et jeunes, les unes fourbissant à genoux, les autres juchées aux échelles pour brosser les murs de la grande maison toujours sale. Elle pouvait interdire son domicile au préfet du Roi !… Omer l’admira, mystérieuse et lourde, escortée de ses chiens nombreux, roquets, loulous, caniches, pour qui elle partageait du sucre préalablement rompu avec ses dents.

Elle détenait plus de puissance que les héros. Une