Page:Adam - L’Enfant d’Austerlitz (1901).djvu/519

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par la roideur de la collerette, certaines modes en honneur au temps des Valois. Cependant que le bichon hurlait, elle se mira dans une glace d’acajou penchée entre deux colonnes de cuivre. Il lui importait peu qu’on ne pût émettre une phrase qui ne fût étouffée par les interruptions du chien. À un ordre de sa mère, elle finit néanmoins par s’accroupir devant lui, l’appelant :

― Amour !… Oh ! l’Amour qui fait du bruit méchant… avec sa petite gueule rose !

Elle le cueillit, le serra contre son cœur, lui offrit tout son visage à lécher.

― Ma fille, tu gagneras des boutons !

Denise haussa les épaules, laissa battre insolemment ses cils, frémir ses narines, tandis qu’elle berçait l’asthmatique et adipeux Amour. Omer lui décocha quelques réprimandes dissimulées sous la plaisanterie. Elle répliqua vivement qu’elle ne s’estimait point si ridicule. Ne courait-on pas en foule au Cirque Olympique pour voir le petit éléphant Baba dérober un mouchoir dans la poche de son cornac, ou le cheval Génie recevoir étendu sur un sofa et affublé d’une robe, les galanteries du cerf Coco ? Si Paris s’amusait à de telles sottises, était-il raisonnable d’attaquer son affection pour Amour, le seul être, après tout, qui lui fit fête quand elle rentrait, personne d’autre ne se dérangeant pour elle ?

― Même Édouard ?

― Oh !…

Elle le négligea de sa moue, en se tournant vers l’oncle Augustin, qui, sous un prétexte improbable, avait été revêtir l’uniforme de grande tenue avant qu’elle arrivât. Cette bizarrerie réveilla toutes les suspicions du jeune homme. Il essaya de la faire remarquer à sa mère ; mais celle-ci, sans répondre, témoignait à haute voix de la gratitude pour le testament du général.