Page:Adam - Le Serpent noir (1905).djvu/220

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LE sEm>EM· Nom 215 le soleil, qui tomba d’une crevasse, et fendit même, en bas, les transparences de l’eau agileou flottaient les tentacules roses de gros polypes gélatineux. Gilberte compara cette caverne colossale à la bouche de l’ogre. Les dents incisives étaient ces récifs aigus que sautait la vague du large pour pénétrer dans le lac mugissant de l`antre. Les molaires soudées entre elles le long des joues, c’était lechemin de granit que nous parcourions vers la clarté de la crevasse ünale. La-haut, indiquait l’enfant, c’était informe comme l’arrière- bouche. Une nuance rougeâtre rendait semblable a la chair les bases des cavernes où s’engouffra la ruée de flots accourus. L’écolière nous montra les amygdales, deux amas presque symétriques de roches, à l’apparence d’éponges pétriüées. Elle répétait ainsi la leçon du docteur, qui s’en égaya. — Et si la bouche se refermait touta coup, nous serions croqués comme des pralines... ‘ Par jeu, Gilberte simula des frissons; mais elle perdit sa joie presque aussitot. Inquiete, elle examina le plafond de blocs entassés, glissés les uns entre les autres, retenus en équilibre par les saillies des parois gibbeuses et verruqueuses, propices auxnids d’oiseaux criards. A ses pieds, la mer se rompait sur les amas de rocs, les recouvrait de cascades bon- dissantes, et s’épanchait dans le lac intérieur, pour être refoulée par les lames accourues, à l’inverse`, du fond lumineux. Ces ondes grimpaient les pentes, bou- chaient les cavernes, s’écoulaient par les fissures, et retombaient au milieu des remous mousseux que for- ' mait la rencontre des deux forces liquides. On respi- rait leur vie froide. Nous nous expliquâmes comment les premières