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LE SERPENT NOIR

anciens condisciples, au Congrès de Biologie. Cette animadversion générale m’incita bientôt à croire qu’il y avait quelque mérite insigne dans la notice. Une élite ne déteste rien tant qu’un de ses membres émerge de l’obscurité commune. Aussi, lorsque je dus entreprendre mon voyage semestriel en Bretagne, pour inspecter nos fabriques d’iode et vérifier les cours du goémon, des algues, sur toute la côte, je me fis assigner, par notre bureau, la tâche de m’enquérir du sérum Goulven. Je communiquai même à ces mes sieurs quelques passages de la fameuse notice, publiée dans la Revue de Thérapeutique. Ils s’intéressèrent à l’hypothèse, sans bien en pressentir toute la portée. Ils m’autorisèrent à voir le docteur. Mais ils m’enga gèrent à la prudence la plus méticuleuse, puisque la Commission des Comptes, au fort de sa lutte contre le Conseil d’administration, lui reprochait surtout, argument très sérieux auprès des actionnaires, cer taines largesses réparties entre quelques chimistes. De coûteuses expériences n’avaient pas abouti, malgré mille promesses, non moins alléchantes que chimé riques.

Ne voulant pas compromettre ma situation d’agent général par des audaces inutiles, je renonçai presque à mon dessein.

Un concours de circonstances très spéciales put seul me décider à la tentative. Ce fut d’abord le manque de l’argent nécessaire à un séjour dans la Haute-Engadine, où j’ai coutume de passer la saison chaude parmi les malades opulents et les médecins à la mode, clients de nos produits. Or, je venais de m’offrir une automobile de vingt-quatre chevaux à