as fait cet acte parce qu’il te plaisait, parce que tu songeais à t’admirer en l’accomplissant. Mais tu n’as pas fait le bien. Tu as dérangé l’ordre de la nature, qui destine les faibles à pâtir sous le joug des forts. Est-ce bien à nous de nous arroger le droit de changer l’ordre de la nature ?... »
Dans l’ordre de la nature, toi, Goulven, toi, fort par l'intelligence, tu dois préserver ta vie et ta pensée- productrices en sacrifiant au sort fâcheux la stérile faiblesse de ta femme. Ce n’est pas en vain que le hasard vous a mis en présence, madame Hélène et toi. Si tu la repousses, elle souffrira durement, car son esprit passionné n’attend que de toi sa nouvelle vie. Esperes-tu faire une bonne action, en lui versant le chagrin que tu auras ôté de ta femme ? Tu auras changé le mal de récipient... Mais le mal subsistera... Et tu auras combattu les lois de la nature qui, pour te reprendre a la mort, te jettent aux bras de cette belle dame éprise... En épargnant ta femme, tu agis pour te plaire en posture héroïque, tu agis pour ton miroir... Oui, tu agis pour ton miroir! Rien que pour ton miroir !... Coquette !
Et je lui pinçai sa taille chatouilleuse. Il se débattit. Nous rentrâmes à l’hôtel. Chacun monta dans ses appartements, sauf moi, qui, sous le porche, guettais le retour de la victime. Tete basse, elle arriva. La réflexion bridait la peau de son front blème. _
— Eh bien ? — criai—je. — Votre coadjuteur vous a-t-il convaincu de me réhabiliter, en vous démontrant la parfaite ressemblance de nos amours, en vous déclarant responsable de toute la destinée de votre époux ? Je suis sur que non, d’ailleurs ! Il ne vous aura fourni que plus de raisons de me mépriser.