Page:Adam - Mes premières armes littéraires et politiques.djvu/381

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qui grognent, de façon à irriter la majorité, mais pas assez fort pour que M. de Morny ait le droit de les expulser. On rit beaucoup d’une histoire de Floquet, qui, s’étant endormi dans la tribune, s’écria tout à coup de sa voix de stentor, tandis qu’un orateur marmottait et que la Chambre somnolait :

« Citoyen président, je demande la parole. »

On juge de l’effet. La chambre tout entière se dresse. On fait vider la tribune publique. Enfin Floquet s’accuse et M. de Morny prend avec gaîté l’incident.

Deux « jeunes » occupent l’attention des « vieux » et leur nom revient sans cesse dans leur conversation. Ce sont ceux de Brisson et de Gambetta.

C’est Pichat qui nous parle pour la première fois de ce dernier. Il me le dépeint mal harnaché, le nez énorme, un œil tout blanc, maigre, se tenant mal, d’une vitalité méridionale enragée, alternant avec des preuves d’observation, de sens pratique. Il malmène les vieux plus qu’aucun autre jeune. Selon lui, l’abstention n’est qu’une formule d’impuissance, les abstentionnistes ne faisant rien, n’organisant aucun moyen d’attaque ni de défense.

L’Union Libérale cependant s’ébauchait. Jules Bastide, Carnot, cherchent une forme d’action, tout en restant résolus à se cantonner dans l’abstention législative.

Jules Simon joue son double jeu habituel,