lui de manière à ce que les génuflexions obligées lui soient aussi douces que possible. Les chantres psalmodient les heures qui précèdent la grand’messe, les prêtres sont dans leurs stalles, le chœur est presque entièrement vide, lorsqu’un personnage sort par la porte d’une sacristie. C’est un grand jeune homme maigre, revêtu d’une soutane et d’un surplis, il traverse rapidement le chœur pour aller se mettre dans une des stalles, mais il s’aperçoit qu’il a oublié de s’incliner devant le tabernacle : il revient vers l’autel et fléchit le genou sur une des marches. Un bruit singulier se fait entendre, c’est celui d’une épée qui s’échappant de sa soutane, glisse sur les dalles. Le jeune homme se hâte de cacher l’arme meurtrière recouverte par les habits pacifiques du lévite, et regagne sa place où il entonne tranquillement le verset du psaume que l’on chante. Cette tranquillité est loin d’être partagée par ceux qui entourent le roi. Les visages pâlissent, on chuchote, on donne des ordres, les crosses des fusils retentissent sur le marbre sonore du temple ; on va, on vient, le mot est donné en un instant ; on commence à faire évacuer les bas-côtés, qui se garnissent de troupes : le roi demande la cause de ce tumulte ; un de ses aides de camp lui parle à voix basse et bientôt ce mot circule dans toutes les bouches : un prêtre armé qui en veut aux jours du roi ! Cependant le malencontreux auteur de tout ce remue-ménage, dont il ne se doute guère être la cause, continue à psalmodier d’une voix ferme et vibrante, lorsque deux grands officiers s’ap-
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