Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/319

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de ses travaux et de ses économies. Cette année de 1791 devait lui être fatale, car au chagrin de la perte de sa fortune se joignit bientôt une douleur qui lui fit oublier ses autres maux. Sa mère n’avait pu survivre à la perte de son mari. La situation de Dalayrac était des plus tristes : en moins de six mois il perdait son père et sa mère, se voyait privé du fruit de ses travaux, et déjà la révolution grandissant de jour en jour, faisait présager l’avenir le plus sinistre.

Ses amis, ses protecteurs, ce monde brillant où il avait vécu, tous se dispersaient loin de Paris, plusieurs d’entre eux s’éloignaient même de France. Malgré ses opinions monarchiques bien connues et les dangers que pouvait lui faire courir son titre d’ex-garde-du-corps du comte d’Artois, Dalayrac ne songea pas un seul instant à quitter Paris, il ne cessa de travailler pour le théâtre, il pensa avec justesse que la renommée de ses œuvres suffirait pour le protéger, il fut même assez heureux pour abriter sous leur égide quelques-uns de ses anciens amis.

Le Ciel lui devait une compensation à tant de tourments : il la trouva dans le mariage qu’il contracta en 1792 avec une jeune personne qui devint la compagne et l’amie de toute sa vie.

À une époque où les lois sur les émigrés s’exécutaient dans toute leur rigueur, et où l’asile et la protection donnés à l’un d’eux étaient regardés comme un crime, Dalayrac reçut, par une voie détournée, une lettre datée de l’Allemagne, et conçue à peu près