Page:Adam - Souvenirs d’un musicien.djvu/44

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trai chez moi, désespéré de voir ma prédiction s’accomplir si vite.

À dater de ce jour, nos recettes tombèrent à un taux tel que nous perdions de 1,200 à 1,400 fr. par jour. Nous avions payé le plus que nous avions pu, il n’y avait rien en caisse. J’assemblai toute la troupe, je fis part de notre situation, et, unanimement, on convint de ne pas fermer le théâtre, de se mettre en république, de partager la recette dans la proportion suivante : 100 fr. pour l’éclairage, la garde, etc., puis on devait payer les machinistes, les hommes de peine, et ensuite partager également entre les choristes, les musiciens et les chanteurs. On ne pouvait guère partager qu’au delà de 300 fr., et on ne les faisait pas ; mais on pensait que cette disette ne serait que passagère. On vécut ainsi quinze jours, et alors les musiciens de l’orchestre déclarèrent qu’ils cesseraient leur service si on ne les payait pas intégralement. Comme cela était impossible, ils ne vinrent plus et le théâtre ferma !

C’était le comble de ma ruine ; en un jour, je me vis privé de toute ressource ; j’avais une maison considérable, 3,000 fr. de loyer, des domestiques, une pension de 2,400 fr. à faire à ma femme dont j’étais séparé, 500 fr. pour le collége de mon fils, et je possédais en tout 100 fr. par mois de l’Institut.

Je renvoyai tous mes domestiques ; l’un d’eux