Page:Adelsward-Fersen - Et le feu s’éteignit sur la mer.djvu/132

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insistait pour passer au doigt de Gérard une bague trois fois trop petite. La bénédiction ; le sermon pour finir — pas long ; très bien. D’ailleurs, l’excellent Parocco avait la réputation d’être fort éloquent. Il ne le fût pas trop.

Enfin, la sortie ; le porche inondé de lumière ; les amis suivant ; tout Capri accouru ; les allemandes affamées et les anglaises « tea-caddy » ; deux ou trois anarchistes, l’air très doux sous leurs blouses rouges, venus là représenter l’Empire du Tsar ; une masse de yankees : les hommes glabres, épaules en plate-forme et pieds en trottoirs, les femmes, kodak aux pattes, l’œil comme de l’acier avec des chapeaux de la rue de la Paix, des robes d’Unter den Linden, des coats de Piccadilly et du corail de Naples… La vieille garde des pestes et des fléaux donnait aussi : choléras les plus marquants de l’Île, serpents les plus venimeux ; tout ce qui n’avait plus le sou ; tout ce qui n’avait plus d’âge… On leur jetait des dragées suivant la coutume locale ; on les en balayait, on les en criblait, on les en mitraillait. Ah ! le délire des gosses devant cette grêle de confetti ! Ça grouillait comme des vers dans un fromage, ça se poussait, ça se battait, ça se bottait : Midi sonnant à grandes volées par-dessus l’émeute…

À ces souvenirs, Gérard riait de bon cœur.