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Page:Adelsward-Fersen - Notre-Dame des mers mortes (Venise).djvu/170

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NOTRE-DAME DES MERS MORTES

vous êtes venu. D’abord ici, le jour où je vous ai montré les fresques et puis à l’église, c’était hier.

— Moi, je trouve qu’il y a si longtemps…

— C’était hier. Comprenez… Quand la nuit dure toujours, tout semble près, surtout le bonheur… Oui, je vous le dis… Surtout le bonheur. La lumière fait naître la distance. L’oubli provient, je crois, de la magie du soleil. On passe, on regarde, on est ébloui. Le lendemain à l’aurore, l’aurore efface le souvenir.

— Alors, vous vous souvenez, Ninette… et vous appelez cela le bonheur ? Je vous remercie du fond de mon âme. Jusqu’à vous, avant de vous connaitre, j’avais aimé, mais pas d’une ardeur pareille. Est-ce la splendeur éteinte de vos regards qui vous rend à la fois douce et lointaine, est-ce le passé somptueux de Venise qui vous couvre comme d’un manteau de Reine, est-ce simplement votre beauté mignonne, votre jeunesse… Mais en vous approchant je tremble