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SOUS LA NUIT ÉTOILÉE…

saient non une arrivée mais un départ, un départ de rêve et d’amour, un départ lent et doux au clair de lune, vers Cythère endormie.

Jacques et Ninette sentaient dans leurs mains réunies trembler leur âme et leurs désirs. À l’arrière, le marquis recroquevillé, le menton sur sa canne racontait encore, en esquissant de temps à autre des gestes chevrotants et discrets. Sforzi n’écoutait plus et regardait. D’ailleurs il s’était vite aperçu de l’aventure dont il était le témoin sentimental. Les voiles de Chioggia étaient passées. Elles glissaient vers le Rialto et disparaissaient une à une, comme des goelands de songe entre les palais du grand canal.

Jacques les yeux tournés vers la jeune fille gardait une immobilité triste. Contarinetta se rapprocha de lui, écouta, sentit cette tristesse.

Et elle lui dit :

— J’ai entendu tout à l’heure de grands frissons courir…