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LA PRIÉRE

les ai connus et j’en ai été heureuse. Maintenant je les devine à leurs caresses, à la tiédeur de leurs parfums…

Jacques à son tour frissonna car l’aveugle se trompait à cause de son infirmité. Ce n’était pas joli, les endroits traversés et ils ne pouvaient rendre heureux. Et leur caresse était sauvage, et leurs parfums ceux de la mer… Murano avait disparu en cachant le cimetière dont la vue obsédait Liéven. Murano et ses verreries, ile et fumées étaient loin derrière la barque le désert d’eau, presque marais, presque pleine merles enserrait de ses eaux livides, de ses herbes courtes et brûlées, de ses pieux. Elle avec ses regards éteints, avec ses prunelles vides ne savait pas, ne comprenait pas. Pour elle les parfums flottaient mélangés au soleil. Elle ne voyait pas la tristesse funèbre, la déroute de ces plaines qu’un souffle de temps à autre faisait miroiter comme sous un lointain rayon de soleil. De lents oiseaux volaient