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NOTRE-DAME DES MERS MORTES

mousseline qui palpitait au mouvement de ses veines.

— Quel horizon fertile en chefs-d’œuvre ! Il est des instants pendant lesquels j’aurais voulu mourir, des instants trop beaux pour que le souvenir s’en souvienne. Mourir avec des musiques et des appels, dans un bercement de baisers et de bijoux, de lèvres et de prunelles voilées, mourir quand l’astre a disparu en laissant une trace éclatante comme ces vaisseaux bosselés de lumière, dans le sillage desquels il reste des rayons. Mourir après avoir chanté l’amour ardent de ces splendeurs, de ces décrépitudes, de ces pauvres vieilles gloires. Mourir enseveli vivant dans le sépulcre de ces gammes et de ces couleurs, dans l’ostensoir de ce coucher de soleil, mourir avec sur les lèvres des mots diaphanes et sonores… mourir !

— Mourir tout seul, mourir sans tendresse, sans cette douceur de croire à une éternité ? interrogea Sforzi en riant dans sa barbe blonde.