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L’HEURE DU BERGER

vacille, et du lit, on croirait un long cierge pareil à ceux dont on entoure les morts. Ninette tousse. Un instant, la crise est si violente qu’elle s’éveille, la bouche remplie d’un goût fade. Elle porte son mouchoir à ses lèvre : L’aveugle ne sait pas que c’est du sang…

Deux jours après, le médecin revient, mais pour passer la nuit au chevet de la malade. On ne sait jamais, a-t-il déclaré au marquis avec des gestes effarés, elle est gravement atteinte. Vous feriez bien de lui avoir un prêtre, rien que pour la réconforter. Ah ! le marquis en a tant vu mourir qu’il est inutile de lui ménager les choses. Il est vrai que celle-là lui a, d’un coup, asséné son âge sur la tête. Il est tout à fait voûté et au coin de ses paupières craquelées, deux larmes, toujours essuyées, sans cesse renaissantes, grossissent, roulent. Contarinetta seule a l’air d’un petit oiseau. Elle ne chante pas, car le sonffle dure à peine, mais le visage au soleil — on lui a porté son lit près de la