Page:Ades - Josipovici - Mirbeau - Le Livre de Goha le Simple.djvu/287

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Nour-el-Eïn se jeta sur lui, chercha à lui griffer la face.

— Ton maître est un fils de chien ! cria-t-elle.

Elle se tut, tressaillant de rage, car la cravache s’était abattue sur son dos. L’eunuque lui demanda alors si elle voulait le palanquin pour se rendre chez son père. Elle refusa, manifestant le désir de s’en aller à pied avec ses trois esclaves. Elle ne comptait emporter que ses bijoux et ses effets les plus précieux.

Elles en firent trois paquets. Mirmah contait l’histoire de chaque parure qui lui tombait sous la main.

— Ce turban, tu devais le mettre pour fêter le fils qu’il ne t’a jamais donné… Ô ! malheur !

— Cette tunique, tu l’as portée le jour de ton mariage… Maintenant, il te renvoie, toi, la plus pure des colombes ! Ô ! malheur ! Qu’il te rende au moins ta virginité !

Bien qu’elle en eût été témoin, Mirmah ne croyait plus à l’adultère de Nour-el-Eïn. Sa maîtresse était innocente, car il fallait qu’elle le fût pour échapper au châtiment. Elle le répétait sous toutes les formes :

— Il dit que tu l’as trompé… toi qui as bu mon lait ! toi le jasmin blanc !

Enfin elles quittèrent le harem, descendirent les escaliers, tragiques dans leurs mellaïas noires. À leur approche, les esclaves de Cheik-el-Zaki se cachaient. Les quatre femmes traversèrent la cour lentement, en groupe compact, comme pour se soutenir. Khalil, le portier, était demeuré à son