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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/127

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APOLOGÉTIQUE. APOLOGIE


disposition à reconnaître sa main, sil y a lieu, dans les elïets préternaturels.

De là Aient encore la gradation établie plus liant entre les divers genres de critères. Si les prophéties, les miracles et autres signes externes tiennent le premier rang dans la tradition couinie dans l’estime des apologistes classiques, c’est qu’on leur attribue, en droit, une plus grande etlicæité et une plus « » rande universalité ; vue dont la justification relève évidemment d’articles spéciaux. Voir Miracle, ProPHKTiE. Si la preiiN c par les critères internes objcctifs ne vient qu’au second rang, c’est que, conqiarée à la précédente ou prise isolément, elle est moins génér.ile, moins objectie et, généralement parlant, moins décisive ; car les diverses propriétés qu’on y considère ne font aboutir ni aussi directement ni aussi facilement à la certitude touchant le caractère non seulement transcendant, nuiis proprement divin de la doctrine qui se donne pour révélée. Pour prendre un exemple, comment parler sans explication, sans restriction, de coïncidence absolue entre la révélation et l'évidence humaine, ou de conformité positive entre les données de la révélation et les postulats ou exigences de notre nature ou de notre raison, quand il s’agit d’une révélation qui porte non pas seulement sur des vérités d’ordre naturel, mais sur des mystères proprement dits ? Entin si les critères internes d’ordre immédiateuu’nt subjectif viennent en dernier lieu, c’est cpi’en réalité ils sont d’une application rare et d’une extrènu' délicatesse ; et même, s’ils valent dans certains cas pour le sujet ipii en bénélicie, ils ne peuvent jamais, en tant qlu' subjectifs. fournir la base d’une apologétique. Phisicurs des elïets que signalent les apologistes protestants, comme « d'être une source de paix et de sanctilication)', pris comme eiTets intimes, sont postérieurs à la foi, et par conséquent, dans les limites où ils existent, ne peuvent servir qu’aux croyants, à titre conlirmatif. L’innnanence de Dieu en nous, très juste en un sens, est insutlisante comme principe d’apologétique ; car cette immanence, d’ailleurs transcendantale par rapport à tout être créé, n’infère nullement une révélation intérieure proprement dite, surnaturelle et dont l’objet tomlje inuuédiatement sous la conscience ou la connaissance de chaque individu. La continuité du plan divin et la loi du progrès indéfini, entendues et appliqiu’es ici en toute rigueur, amèneraient ce que nous avons constaté chez beaucoup de protestants modernes, la confusion de l’ordre naturel et de l’ordre surnaturel, de la ré"élalion virtuelle ou imjjroprement dite et de la révélation formelle ou propreuu’ut dite. L’ap[)étit même du surnaturel, à supposer que nous l'éproin ions avec certitude de son origine divine, nous conduirait tout au plus à la connaissance de Dieu auteur de la grâce et lin surnaturelle, mais n'énoncerait rien de précis sur le contenu de la révélation.

Que l’apologétique classique, prise dans ses grandes lignes, mérite l'épitliète de « traditionnelle » , qu’elle se ratlaciie non seulement aux scolasticpu^s, mais remonte jiiscpi'à 1 âge patristique et au delà, l’aperçu historicpu' donne dans la première partie de cet article le montre sullisamment. En oulre, l’Eglise est là, qui cori’obore de son autorité les données essentielles du procédé. Plus d’une fois eUe a reemliqué la nécessité d’un jugeuuut préalable et certain touchant le fait de la révélation. Parmi hs propositions réprouvées par In.xocknt XI, le 2 mars 1671), la a ingt et unièuu' disait : « L’assentinu’ut de la foi siu-naturelleet salutaire est couq)atible avec une connaissance seulement probable de la révélation, et nu'-nu' avec un sentiment de crainte, de la part du sujet, (pu> Dieu n’ait pas parlé. » Denzinger-Bannwart, Encltiridion,

n. ii^i (io38). PiK IX, dans son encjciique Qui plurihus, du g novembre 1846. a indiqué la raison de cette nécessité : « La raison humaine, pour n'être pas trompée dans une affaire de cette importance, doit examiner avec soin le fait de la révélation divine, alin de rester assurée que Dieu a parlé et pour que sa soumission à la parole divine soit raisonnable, suivant la sage recommandation de l’apôtre. « 

Récemment, le Saint Otlice a condamné cette proposition, la vingt-cinquième du décret Lamentabili : '( L’assentiment de foi repose en dernier lieu sur une accumulation de probabilités. ^4ssenstis fidei ultimo iiinititur in congerie prohabUitatiim » . Proposition fausse ; soit qu’on consiilère l’assentiment de foi eu lui-même, inuuédiatement, car il repose sur l’autorité divine, son motif propre ; soit qu’on le considère médiatement, dans son présupposé rationnel, la connaissance du fait de la révélation, car il doit alors reposer sur un jugeiuent pratique certain. Dans les deux cas, l’adverbe ultimo est le terme important, pour déterminer la portée de la condamnation. Deux exemples, qui touchent de près à des controverses récentes. Dans un passage signalé par Newman, Giummar of Assent, p. li, le théologien catholique Eusèbe Amort prend pour point de départ d’une argumentation antiprotestante la probabilité plus grande dont jouit manifestement la religion catholique (Demoiistratio ciitica religionis catlialicæ préface, Venise, 17/t4)- Mais en même temps il fait intervenir ce principe réflexe : Dieu, dans sa sagesse et sa providence, doit rendre la religion qu’il a révélée manifestement plus croyable que les fausses religions. A l’aide de ce principe réilexe. Amort conclut à la certitude du caractère divin de l’Eglise catholiqiu'. On peut contester la valeur de cette argumentation, mais on ne peut pas dire que ce théologien fonde en dernier lieu l’assentiment de la foi sur une probabilité. Xewman, à son tour, prend pour point de départ, non pas une probabilité plus grande, mais une accumulation de probabilités diverses. Est-ce pour en rester à la notion de prubabilité ? Au contraire, il allirme formellement qu’une vraie certitude du fait de la révélation et du caractère divin de l’Eglise résulte de cet ensemble de preuves ; non pas simple addition de probabilités considérées comme telles, nuiis par une inférence de la raison, basée sur autre chose que la simple probabilité des preuves, prises en elles-mêmes et disjointes. On peut ne pas goi’ilcr le procédé, mais on ne peut pas dire que Nevvman fonde en dernier lieu l’assentiment de foi sur une accumulation de probabilités. — Voir J. J. Toohey, S. J., art. The Granimar of Aasent » and llie uld Pliilosoplir, di s The Irish Theological Quarterly, art. 1907, p. ^71 ss. ; du même, art. ie^vman and Modernisni, 111. ilaus The Tablet. 18 janv. 1908, p. 86 ss.

Plusieurs fois encore, 1 Eglise a maintenu la valeur objective des motifs de crédibilité que rapologétique classique met en première ligne. Le 18 novembre 1 835 et le 8 septembre 18^0. labbé Baltain dut souscrii-e cette proposition : « La preuve de la révélation chrétienne tirée des miracles de Jésus-Christ, sensible et fiappanle pour les témoins oculaires, n’a point perdu sa f(u-ce et son éclat vis-à-vis des générations postérieures. » Denziiiger-Rannwart. n. 161>4 ('^90)- l’i^" I^' dans 1 encyclique citée, fait ajjjnl aux prophéties et aux miracles d ordre pliysicpie et moral, couime preuves de la divinité de la religion chrétienne. C’est dans le même esprit que le concile provincial tenu à Cologne en 1860, et qui préluda en quel<]ue sorte au concile du Vatican, établit, au chapitre v. la nécessité de la connaissance certaine du témoignage divin, la portée et la force probante des motifs de crédibilité,