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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/247

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CATACOMBES

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bolise sans aucun doute l’Eglise calomniée et persécutée. Noé dans l’arche, sorte de boite flottant à la surface de l’eau, pai-aît l’emblème du peuple sauvé. La délivrance de l’àme chrétienne, échappant aux épreuves de la vie et aux menaces de l’enfer, est peut-être aussi rappelée par ces divers épisodes bibliques, car on les voit indiqués avec ce dernier sens dans les liturgies funéraires. L’idée de résurrection a été appliquée par Notre-Seigneur lui-même à l’histoii-e de Jouas, dont les divers épisodes sont, depuis le commencement du ii*^ siècle, [)eiuts isolément ou ensemble dans les catacombes : le prophète précipité du navire, avalé par le monstre marin (auquel les artistes donnent la forme du dragon ou de l’hippocampe), rejeté sur le rivage, étendu sous la cucurbile. Moïse frappant le rocher, dont l’image parait d’abord dans la plus ancienne chambre du cimetière de Priscille, puis se retrouve partout dans les catacombes, offre une signilication symbolique non moins claire, mais d’une nature toute ditlerente. Moïse, chef de la Loi ancienne, est ici le type de Pierre, chef de la Loi nouvelle. L’aspect de certaines fresques suffirait à le démontrer : particulièrement une peinture du cimetière de Sainte-Sotère, où le prophète, avec son front chauve, sa barbe et ses cheveux blancs, rappelle tout à fait le saint Pierre dont l’art chrétien a conservé la tradition. Mais cette interprétation est de plus indiquée par les anciens eux-mêmes. Sur deux fonds de coupe appartenant vraisemblablement au IV’siècle, à côté de l’image, découpée dans une feuille d’or, de Moïse frappant le rocher, est écrit le nom PETRvs. Une grande coupe de verre gravé, du v- siècle, découverte en Albanie, représente, entre autres épisodes bibliques, Moïse frappant le rocher, près duquel est écrit : Peints s’irga percutit, fontes coeperunt currere. Sur les sarcophages romains du iV siècle, à côté du Moïse est presque toujours représenté Pierre arrêté par les soldats juifs : les deux têtes sont identiques. Deux sarcophages, l’un conservé à la villa Albani, l’autre au musée de Latran, montrent plus clairement encore l’identification de Moïse et de saint Pierre : un seul personnage frapj)e le rocher et est en même temps arrêté par les soldats juifs.

Quelques sujets bibliques pourraient encore être indiqués : Adam et Eve, Job, les Hébreux recueillant la manne, David tenant sa fronde. Elle enlevé au ciel, le jeune Tobie. Quant aux saints de la Loi nouvelle, à l’exception du groupe des apôtres, et de sainte Pétronille peinte au iv’siècle dans une galerie voisine de son tombeau, ils ne sont jamais représentés dans les parties anciennes des catacombes : c’est longtemps après la paix de l’Eglise qu’on y voit, en petit nombre, apparaître leurs images. Marie seule se rencontre dans les peintures primitives : voilée, tenant l’Enfant divin, et acconq)agnée d’un prophète, sur un loculus du cimetière de Priscille, i*^^"" ou ii’- siècle ; assise, tête nue, l’enfant entre les bras, dans un arcosolitim du même cimetière, cours du ii° siècle ; entre deux monogrammes du Christ, à mi-corps, les bras étendus, l’enfant debout devant elle, dans un (iicosolium du i’siècle ; au cimetière Ostrien. Une peinture, aujourd’hui presque effacée par le salpêtre, dans un cubiculum de Priscille datant du a’siècle, la montre assise, voilée : devant elle un jeune homme se lient debout, le bras droit étendu : les critiques s’accordent à reconnailre dans cette scène l’Annonciation. Marie est surtout représentée offrant son divin Fils à l’adoration des Mages. Ce sujet a été reconnu par de Kossi et le P. Garrucci dans une jieinturc du ne siècle, à peu près détruite, au cimetière de Priscille ; il apparaît au m" siècle dans celui de Domitille, et à partir de celle époque se retrouve fréquemment dans diverses catacombes. Les Mages,

vêtus à la phrygienne, avec la chlamyde flottante, sont tantôt deux, tantôt trois, tantôt quatre. Marie semble aussi avoir été quelquefois représentée ou symbolisée, de même que l’Eglise, dans la femme en prière, les bras étendus, lorante, si souvent peinte et gravée dans les catacombes. Mais, ordinairement, les représentations d’orants ou d’orantes font seulement allusion aux défunts enterrés dans lesarcosolia ou sous les marbres que décorent ces images : quelquefois, comme dans le cubiculum dit des cinq saints, seconde moitié du m* siècle, au cimetière de Calliste, ou dans une galerie un peu postérieure du cimetière de Thrason, elles ont les caractères individuels de portraits.

Les peintures des catacombes ne font point d’allusions directes aux épisodes des persécutions. Une cependant, sous la voûte d’un arcosolium du m’siècle, au cimetière de Calliste, semble représenter un fidèle répondant à son juge : celui-ci, la tête ceinte de laurier, se tient debout sur un piédestal, près duquel est un assesseur ou accusateur ; un quatrième personnage, peut-être le pontife païen, s’éloigne avec dépit. Mais cette interprétation est aujourd’hui très contestée, et l’on reconnaît plutôt ici la scène biblique du jugement de Suzanne. Dans la catacombe des Saints Marc et Marcellien, on rencontre une curieuse allégorie : au fond de l’arcosolium où reposèrent les deux martyrs, est représenté, à droite, un homme montant à une échelle, sous laquelle se tient le serpent infernal : le sujet de gauche, effacé, faisait probablement pendant à celui-ci. Il y a là une allusion au martyr montant au ciel et triomphant du démon, empruntée à un passage célèbre des Actes de sainte Perpétue. Au cours du iv* siècle seulement on s’enhardit à peindre les souffrances des martyrs : encore ces scènes assez fréquentes dans les basiliques sont-elles représentées dans les catacombes par un seul exemple : c’est une peinture vue par Prudence dans la crypte de saint Hippolyte et montrant ce martyr déchiré par des chevaux furieux : elle a été probablement détruite quand cette crypte, très riche, fut pillée par les Goths, et les restaurations du vi* siècle en doivent avoir eftacé les derniers vestiges.

Les peintures anciennes des catacombes n’offrent point de portrait proprement dit de Notre-Seigneur. Il est représenté, soit sous la figure allégorique du Bon Pasteur, soit avec les traits d’un jeune homme imberbe, parlant à la Samaritaine, multipliant les pains, guérissant le paralytique, l’aveugle-né ou l’hémorroïsse, ressuscitant Lazare. J’ai déjà cite de très anciennes images du baptême du Christ et de son covu’onnement d’épines dans la crypte de Lucine et le cimetière de Prétextât. Tout à la lin du n’siècle, un sujet nouveau apparaît dans un cubiculum de la catacombe de Saint-Sél)aslien : l’enfant Jésus couché dans la crèche, près de laquelle sont le bœuf et l’àne. Le même cubiculum et deux autres qui semblent contemporains, au cinu-tière de Calliste et de Domitille, montrent le buste du Christ, nimbé ; même à cette époque, toute allusion au crucifiement est encore absente. Dans les temps antiques, on représentait la croix par de secrètes images : la plus frappante, dans une chambre de la fin du ii*^ siècle ou du commencement du iir, au cimetière de (’alliste. i-slle tritlent, auciucl s enroule un dauphin. Au iii^ siècle, la croix dissimulée sous la figure d’un tronc verdoyant, cou[)é d’une branche transversale, se montre parmi les fleurs dans un arcosolium du cimetière de Calliste. Il faut descendre jusqu’au vu’siècle pour trouver dans une calacomi)e, celle de Saint-Valentin, la représentation de Notre-Seigneur sur la croix.

Une observation inq)ortante. au sujet des fresques retraçant des scènes bibli(iucs. est la suivante : plu-