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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/329

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CONCORDATS

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fut toujoiu-s, à paitir du discours célèbre de Romans, la suprême régulatrice des cabinets français en matière politico-religieuse, il était inévitable que le retrait de notre ambassadeur auprès du pape entraînât la dénonciation du Concordat.

Dans la discussion parlementaire de la loi de 1900, dans la presse dévouée au gouvernement, il a été de mode de rejeter siu- le souverain Pontife toutes les responsabilités. Rien n’est plus injuste, ni plus mensonger. L’affaire des évêques de Dijon et de Laval était trop mince, trop mal choisie même.

Entre la rupture diplomatique du 30 juillet igo^ et

; discussion de la première loi Briand, le Saint-Siège

gardé l’expectative la plus réservée. Et quant aux

iflits dont le gouvernement a pris prétexte pour

ppeler notre ambassadeur auprès du Vatican, qui

.’ira lu le Lhre blanc conviendra que cette mesure

tréme a été prise parce qu’on l’a bien voulu.

Vu sujet des nominations épiscopales, M. Combes étendait arrêter les listes de candidats sans pour. 1er préalable avec le nonce, imposer au pape l’acptation d’une fournée d’évéques sous peine de ne pas désigner des titulaires aux autres sièges vacants. L ; i prétention était contraire aux précédents, au bon sens, au droit imprescriptible et au devoir sacré qu’a le pastem* suprême de juger par lui-même de la dignité des prélats qu’il va investir de leurs fonctions. En subissant les conditions de M. Combes, Pie X eût trahi sa conscience et prouvé sa déraison.

Au sujet de la visite rendue, à Rome, au roi d’Italie par le Président de la République, trois choses sont absolument certaines :

i" Le Saint-Siège demandait simplement que M. Loubet ne choisit pas Rome pour son entrevue avec Victor Emmanuel II ; et par cette exigence, il suivait la conduite tenue, depuis 1870, à l’égard de tous k’s chefs d’Etat catholiques, pour sauvegarder en principe des droits sacrés.

2" Le gouvernement français savait, bien avant la

viiiuc du roi d’Italie à Paris, que la présence de

^. Loubet au Quirinal appellerait une protestation

I luelle du pape. En élevant cette protestation au

Il de Pie X, le cardinal Merry del Val n’a fait que

oduire les motifs que le cardinal Rampolla avait

.1 fait valoir au nom de Léon XllI.

i’Personne n’a démontré par un document diplo ili(pie que notre rapprochement avec l’Italie ait

..nu, comme à une condition sine qua non, à la pro , "ssc d’une visite à Rome. Et en tout cas, si cette’uesse a été demandée, on ne prouvera point que

s fussions oliligés, par intérêt national, à y sovis e. Au point de vue économique, l’Italie ayant plus

oin de nous que nous n’avions besoin d’elle, nous

nieurions les arbitres de la situation. Au point de

lie politique, le Concordat etnos intérêts à l’extérieur

nous coinniandaient de ménager le pape ; d’autant

que l’entente avec Victor Emmanuel ne dissolvait

pas la Triplice.

Reste la démission des deux évêques de Laval cl de Dijon

Pour i chii de Laval, les griefs étaient anciens ; déjà sous Léon XIII, la démission avait été demandée, promise, puis retirée. Ouand, sur ordre de Pie X, le prélat fui cité à Rome, il livra cette citation à M. Combes, qui protesta au nom des droits de l’Etal et défendit le voyage ad limina. Même aventure pour l’évêfiuc de Dijon. Là-dessus, le cardinal secrétaire d’Etat intervient pour expliquer les principes de droit et l’état de fait de la cause. Le gouvernement français menace de rompre, si les procès canoniques engagés suivent leur cours. En offrant do [)roh)iiger les délais impartis aux prélats cités à Renne, le [lape

ouvre la porte à de nouvelles négociations. On lui répond par le rappel de l’ambassadeur.

Qu’est-ce que le pouvoir hiérarchique du pape dans l’Eglise, si le caprice d’un ministre peut soustraire à sa juridiction ses justiciables ? Et quelle sûreté demeure dans les relations diplomatiques, si leur maintien dépend d’un prétexte futile, si le retrait d"un plénipotentiaire peut se transformer, sans fait nouveau et sans explication, en suppression d’une ambassade ?


Malgré la discom-toisie dont on usait et la violation de son droit de pasteiu* suprême. Pie X — celui qu’on représente comme le fougueux artisan de la rupture — laissa le nonce à Paris jusqu’au dernier moment. Il n’est pas une phase de la crise où il ne se soil montré prêt à chercher une transaction qm laissât intacts les principes. Voilà ce dont le Liyre blanc témoigne. Tous les esprits élevés et sincères ont noté l’embarras, la duplicité, l’arrogance, la brutalité de notre diplomatie dans cette affaire. Notre gouvernement s’est montré parfaitement dédaigneux des droits qui né liouvaient être revendiqués les armes à la main.

La dénonciation du Concordat, comme la ruptui’e des relations diplomatiques, s’est faite sans motifs et sans dignité.

Quand la loi de igoô a été votée. Pie X a élevé une noble protestation. Rien n’était plus légitime, vu surtout que le régime concordataire était supprimé pour céder la place à un régime de séparation absolument inique.

Trois textes législatifs ont jusqu’ici déterminé ce régime (lois des Il décembre igoô, 2 janvier igo ; ^, II avril 1908). Trois mois le peuvent caractériser : confiscation de la propriété ecclésiastique la plus légalement établie et la plus historiquement indiscutable (églises, demeiu’es des évêques, des curés et des clercs, biens et rentes, même des fondations pieuses, des œuvres de charité, des caisses de retraite du clergé) ; mise des institutions et des personnes ecclésiastiques hors du droit commun ; attaque sournoise de la hiérarchie même de l’Eglise, qu’on ignore pour la soutenir, qu’on connaît pour l’attaquer.

En outre, l’exercice public du culte dans les églises (que l’Etat assure être siennes ou communales) dépend unifquement, selon la loi, du caprice gouvernemental ; il ne pourra se maintenir que dans les limites de sa tolérance. Un seul gain demeiu-e dans celle déroute lamentable. Le pape nomme seul les évêques, et les curés n’ont plus besoin d’être agréés par le gouvernement.

Dans ces conditions, il faut certainement beaucoup d’optimisme pour préférer le nouveau statut de l’Eglise de France à l’ancien. La spoliation des biens ([u’elle avait s’est faite sans que la liberté lui ait été donnée en échange de son patrimoine ; la jalousie et la malveillance de l’Etat lui sont plus assurées que jamais. Une pareille séparation est la meilleiu-e apologie de la convention de l’an IX. Alors que les gouvernements faisaient olliciellemcnt profession de l’antique religion nationale, les garanties précises d’un traité n’ont pu épargner de mauvais jours au catholicisme dans notre pays. Comment peut-on lui promettre un brillant avenir, alors que ceux qui détiennent le pouvoir sont les ennemis jurés de toute croyance en Dieu et ne sont légalement tenus à rien à l’égard de l’Eglise ? Sans doute, l’esprit politique peut être une barrière au débordement des fantaisies tyranniques. Mais, l’expérience le montre, cette barrière est singulièrement fragile ; d’autant que la complicité de l’opinion est, à coup sûr, acquise au despotisme anonyme, tant que celui-ci ne doute pas de lui-même.

Telle est l’évidente leçon que donnent Ihisloire

(ft)o