Aller au contenu

Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/415

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

813

CRITIQUE BIBLIQUE

814

prétcrul élucider c’est de savoir coiuMient S. Luc, qui connaissait le texte de Josèphe, apu faire erreur. L’hypothèse d’une confusion de la part de Josèphe, mise en avant par Michælis, Jean Lightfoot, Harnack et d’autres encore, est traitée simplement < d’audacieuse supposition » (buld assnmption). Cependant, l’exactitude de Josèphe n’est pas encore un dogme historique, il s’en faut. La récente découverte des papyrus araméens d’Eléphantinen’a pas été pour le plus grand bien de sa réputation d’historien. Ceux que le D"^ Sa-CHAU a publiés en 1907, donnent raison, semble-t-il, au texte de Xéliémie, contre Josèphe, à propos du grand prêtre Johannan, fils d’Elyashib, et de Sanaballat, satrape de Samarie.

L’apologiste avisé sait attendre. L’histoire lui a appris que la science de demain résoudra peut-être la difficulté soulevée par la science d’aujourd’hui : dies diem docet. Au lieu d’entasser hypothèse sur h jpothèse pour accorder les données de la chronologie biblique au sujet de l’antiquité de riiomme avec la découverte des silex taillés de Thenaj’, on eût mieux fait de commencer par établir deux points : d’abord, si la Bible nous renseignait vraiment sur l’âge de l’homme ; ensuite et surtout, si les silex de Thenay étaient réellement contemporains du terrain tertiaire. La géologie n’a pas encore fourni cette preuve, elle y a plutôt renoncé.

On oublie trop que, si la foi garde un droit de contrôle sur les conclusions de la critique biblique, celle-ci peut, à son tour, reviser les positions de l’exégèse coui-ante. Pour se rendre compte des progrès réalisés en exégèse pendant ces deux derniers siècles, il suffit de comparer les commentaires de Cornélius A Lapide, S. J. (-7 1687), avec le Cursus Script. Sacrae entrepris, il y a vingt ans, par le P. Cornely, S. J., et ses collaborateurs, ou encore avec la collection des Etudes />/7y//(7 « es publiées sous la direction du P. La-GRAXGE, O. P. Quant à l’histoire littéraire et critique des livres des deux Testaments, il serait intéressant de rapprocher brusquement la Bibliotheca sacra de Sixte de Sienne, O. P. (y 1069) de l’Histoire de l’A. T. par M. Pelt, igo^S et de V Histoire des lis’res du N. T. par M. Jacquier, igoS-igoS. Si le sens fondamental des interprétations dogmatiques garde une valeur permanente, c’est que, par définition, le dogme est une vérité certaine admise par le croyant sur l’autorité même de Dieu. Voir Dogme. Mais ici même il y a place pour le i^rogrès, quand il s’agit de préciser la formule du dogme et surtout de faire l’histoire des formules qu’un seul et même dogme a reçues dans le texte biblique, de la Genèse à l’Apocalypse. Voir Exégèse. Là même, on recherchera s’il est Arai que le dogme condamne le croyant à une exégèse tendancieuse.

/i. L’Eglise et la critique biblique. — On reproche à l’Eglise de ne pas encourager les études seripturaircs ; elle interdit aux fidèles la lecture de la Bible, elle s’oppose, de tout son pouvoir, à ce qu’on la traduise en langue vulgaire ; et ici, on rappelle les condauinations portées contre les travaux de Richard Simon, contre le Nouveau Testament de.1/t » /(set, plus près de nous, contre les Evangiles de M. Lasserue. Quant aux versions modernes, qui ont paru avec l’imprimatur ecclcsiastifjue, elles sont restées sous la tutelle obligée de la Vulgale officielle, en dépit de leur prétention à dépendre des textes originaux. On peut en dire autant des commentaires donnés par les catholiques depuis le xvi" siècle. Du reste, ajoute-t-on, ces abus sont conformes à la législation ecclésiastique. Cf. Coiic. Trid., Scss. iv ; Concil. F « //c., Sess. iii, cap. 2 ; Décret. Lamcnt., Prop. i-.’, , Denz.’", ; 8.’, , 1788, 2001200/i ; liegulæ Indicis, 3 et 4- En somiue, les études

bibliques n’auraient progressé qu’en dehors de l’initiative de l’Eglise, et bien malgré elle.

Réponse. — « ) De tout temps, l’Eglise a revendiqué le droit de surveiller la diffusion du texte biblique, d’en contrôler les versions, et de juger les interprétations privées. Elle estime que ce droit découle immédiatement de son magistère religieux suprême, et que le bien des âmes lui fait un devoir d’en user. Cf. Franzelin, De dii’. Trad. et Script., Sect. iii, th. 18-21 ; J. B. Malou, La lecture de la Sainte Bible en langue i’ulgaire, 1846, 2 vol. Ce faisant, l’Eglise a sauvé la moralité et le bon sens dans la chrétienté ; il n’est d’excentricité, et même de crime, que, dans les sectes dissidentes, l’on n’ait tenté de justifier au nom de l’Ecriture. C’est ce dont convient l’anglican Farrar, dans son livre History cf Interprétation, 1886. La législation ecclésiastique ne soustrait pas la pai-ole de Dieu aux fidèles. Quand donc a-t-elle défendu de lire la Bible dans son texte original, hébreu ou grec ; ou même dans les versions anciennes (Septante et Vulgate latine), dont la fidélité substentielle lui est connue ? Elle autorise la lecture des versions modernes, pourvu qu’elles aient été suLimises à son contrôle, et qu’on les accompagne de quelques courtes notes, destinées à prévenir les interprétations erronées. Dans toutes les langues du monde, il existe aujourd’hui des traductions qui vérifient cette double condition ; et dont quelques-unes ont conquis, tout au moins par l’usage, une sorte de position officielle : enanglaisla version dite (/eZ)oH « ?, en allemand Allioli, en français Glaire, en italien Martini, en polonais Wujek, en néerlandais Beelen, etc. Dans ces versions, l’Eglise admet qu’on difi"cre de la Vulgate aussi souvent que des raisons plausibles autorisent un écart. Il y a injustice ou ignorance à ijrétendre que tous les ouvrages de ce genre publiés par des catholiques, pendant le xix siècle, restent servilement tributaires de la Vulgate. A des degrés divers, ces travaux représentent, en général, un eff’ort sincère, et souvent heureux, pour arri-Aer à plus de conformité avec les textes primitifs. En condamnant certaines traductions modernes, l’Eglise a eu le plus souvent d’autres griefs à faire valoir que leur divergence d’avec la Version latine ollicielle. Ce fut précisément le cas du Nouveau Testament de Mans, dans lequel on avait relevé des erreurs doctrinales. Ces erreurs justifient sutlisamment les condamnations portées par Clément IX (1668) et Innocent XI (1679). Il faut d’ailleurs accorder que l’alTaire s’envenima de sa connexion avec la (pierelle janséniste. Quand, quelques années plus tard, Isaac Louis Le Maistre de Sacy reprit la traduction de toute la Bible, y compris le N. T.. mais avec les corrections essentielles qu’on lui avait demandées, son œuvre rencontra un tout autre accueil. Cf. J)ict de la Bible (Vigouroux), t. III, 2367-2868. — La mise à l’Index du livre de M. Lasserre, Les saints Iis’angiles, trad. nouvelle (19 déc. 1883), s’explique surtout par la liberté excessive prise par l’auteur vis-à-vis du texte et du sens traditionnel. On conviendra qu’il y a bien ([uelque audace de la part d’un laïque sans théologie à porter la main jusque sur le « Notre Père ». — Si l’Eglise a condauiné les Sociétés protestantes pour la dillusion de la Bible, c’est qu’elle jugeait certains passages des versions distribuées par ces agences, incouq)atiijles avec son dogme ; elle était si loin de réprouver le procédé lui-même, que plusieurs sociétés analogues se sont formées parmi les catholitiues avec sona|)probation.Onsait que, depuis quehiues années, il se tient périodi([Ucment des congrès, présidés par (les é^è(ples, pour la ditfusiou du livre des Evangiles. Cependant, l’Eglise catholicpie n’a jamais perdu de