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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/472

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DETERMINISME

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décisions de l’Eglise, jiar l’institution des exorcistes, enCn par la in’icre que tous les prêtres, à la lin de la messe, adressent à saint Michel : « de rejeter dans l’enfer Satan et tous les esprits mauvais qui errent par le monde pour la perdition des âmes » ; mais, dans les cas particuliers, un fait ne doit être proclamé diabolique que s’il dépasse le pouvoir de tous les agents naturels, connus et inconnus, et si sa nature ou sa Gn ne permet pas de l’attribuer à Dieu ou à ses anges. Dans les milieux matérialistes, le démon ne doit pas montrer son action. Il lui suffît en effet d’avoir amené des créatures intelligentes, faites à l’image de Dieu, à proclamer elles-mêmes leur déchéance, à ne vouloir jjIus être qu’une collection d’animaux savants et à s’obstiner de choisir pour ancêtre un singe ridicule, borné et libidineux. Abstraction faite de ce prodige continu, l’action du démon ne doit pas pouvoir être constatée, sinon il contribuerait à amener ces égarés à reconnaître l’existence d’un monde des esprits. Il ne faut donc pas oublier que, si Dieu peut quelquefois, dans sa bonté, se manifester par des prodiges dans un monde matérialiste, le démon n’a pas coutume de le faire. Il ne faut pas se laisser duper par les charlatans ni par des phénomènes de névrose, de suggestion, ou de ti’ansmission de pensée. Ce sont là en somme lesrègles du Rituel romain pour les exorcistes :

In primis, ne facile credat aliquem a dæmonio obsessum esse ; sed nota liabeat ea signa, quibus obsessus dignoscitur ab iis qui vel atra bile, vel niorbo aliquo laborant. Signa autem obsidentis dæmonis sunt : Ignota lingua Joqui pluribus verbis, vel loquentem intelligere : Distantia et occulta patefaccie : Yiies su2)ia aetatis seu condifionis naturam ostendcre : et id genus ah’a, quæ cum plurima concurrunt, majora sunt indicia.

Cette question sera d’ailleurs étudiée en détail, avec les diverses manifestations diaboliques consignées dans le Nouveau Testament ou observées depuis, à l’article : Possession diabolique

Bibliographie. — "Voir toutes les théologies au traité : De Deo creatore, et les traités particuliers consacrés par quelques théologiens aux anges et aux démons : Maldonat (traduit en français par François de la Borie, Paris, 1605) ; Suarez, t. II, Pai’is, 1856 (volume de 1130 pages) ; saint Thomas n’a traité qu’incidemment des démons, surtout dans le Commentaire sur les Sentences, II, dist. 3 à 7, et dans la Somme théologique, Prima, qu. 63 à 64 ; toutes les encyclopédies et tous les dictionnaires traitent cette cpiestion, chacun à son point de vue particulier ; des revues, comme l’Echo du merveilleux en France et la Zeitschrift fur Religionspsychologie en Allemagne, étudient les phénomènes intermédiaires entre l’ordre matériel et l’ordre spirituel. Voir aussi : de Mirville, Des esprits et de leurs manifestations diverses, Paris, 1 863-1 868 ; Ribet, La mystique divine distinguée des contrefaçons diaboliques et des analogies humaines, 3 in-8*, Paris, 1896 ; Boris Sidis, The Psychology of suggestion, New-York, 1898 ; et quelques traités de médecine sur les névroses et hystéries. On trouve enfin de nombreuses monographies, comme Lenormant, La magie chez les Chaldéens, Paris, 1874 ; K Kiesewetter, Der Occultismus des Altertums, Leipzig, 1896 ; J. A. Hild, Etude sur les démons dans la littérature et la religion des Grecs, Paris, 1881 ; R. Fr. M, J. Lagrange, Etudes sur les religions sémitiques, 8°, Paris, 1906 ; G, Henke, The Gift of Tongues and related phenomena at the présent day, dans American Journal of Theology, avril 1909, p. 193-206 ; Persian Dualism, ibid., juillet 1904, p. 487-501 ; A. Lemonnyer, V air comme

séjour d’anges, d’après Philon d’Alexandrie, dans Bévue des sciences philosophiques et théologiques, avril 1907, p. 305-311 ; Witton Davies, Magic Divination and Demonology, Londres, 1898 ; S.Karppe, Etude sur les origines et la nature du Zohar, précédée d’une étude sur l’origine de la Kabbale, Paris, 1901 ; Campbell Thomson, Semitic Magic, its origins and development, 8*^, Londres, 1908 ; M. Schwab, Vocabulaire de l’angélologie, d’après les manuscrits hébreux de la Bibliothèque Nationale, Paris, 189’j ; A. L. AVilliams, The cuit of the Angels at Colossae, dans Journal of theological Studies, avril, 1909, p. 4’3-438 ; F. Farjenel, Les esprits en Chine, dans Journal Asiatique, sept.oct. 1901, p. 21-29. Sur les idoles, les démons et les traditions chez les sauvages, voir les récits des missionnaires, en particulier dans les Annales de la propagation de la foi ; cf. J. Teilhard de Chardin, La Guinée supérieure et ses missions. Tours, 1889, p. 161-i’77 ; etc.

F. Nau.


DÉTERMINISME. —
I. Notion du déterminisme, —
II. Il est incompatible avec la foi chrétienne. —
III. Brève indication historique. —
IV. Division et discussion : A. Déterminisme métaphysique. B. Déterminisme physique. C. Déterminisme psychologique. D. Déterminisme théologique,

I. Notion da Déterminisme. —

Le mot « déterminisme » n’est pas exempt de toute ambiguïté. Il signifie parfois l’ensemble des causes suffisantes pour produire un phénomène. C’est ainsi qu’on « établit le déterminisme » d’un fait physiologique, lorsqu’on parvient à assigner tous ses antécédents nécessaires, de manière à pouvoir prédire avec certitude que le fait suivra, dès que ces antécédents sont réalisés. Cependant ce n’est là qu’un sens dérivé, qui ne nous intéresse pas directement, et que nous notons seulement pour éviter toute équivoque. Le déterminisme proprement dit est une doctrine philosophique concernant la A-olonté humaine. Elle prétend que toute volition est nécessairement le résultat de l’état antérieur de lunivcrs. Etant donnée telle situation cosmique, impliquant tous les éléments physiques et psychiques qui constituent le réel, tout acte volontaire qui lui succède de fait, lui succède nécessairement. Le monde, à un stade quelconque de son existence, est gros du stade suivant et est lui-même le résultat du stade qui l’a précédé. Le déterminisme n’admet à cette règle aucune exception ; et l’applique notamment à la Aolonté de l’homme dans tous ses actes, dans toutes ses apparentes initiatives.

Il est donc manifeste que le déterminisme est radicalement opposé au libre arbitre. Celui-ci, quelle que soit la manière dont on le conçoive ou le démontre, implique essentiellement une initiative réelle, c’est-à-dire, un acte qui ne résulte pas nécessairement, dans sa détermination ultime, des facteurs agissant sur la volonté. — Cependant il serait inexact de voir dans le déterminisme la simple négation de la liberté morale. A celle-ci s’oppose également le « fatalisme », qui n’est pas en toute rigueur identique avec le déterminisme. Stuart Mill s’efforce de les distinguer dans sa’( Logique » (Livre VI, c. 11) ; mais son concept du déterminisme est trop exclusivement psychologique pour que la distinction soit recevable. — Le fatalisme affirme que tout arrive parce que tout doit arriver. Les olympiens mêmes étaient soumis au destin ; pom* le mahométan, tout ce qui se fait « était écrit » ; et peut-être trouvons-nous une réminiscence du fatalisme antique dans la doctrine sur le retour perpétuel de toute chose que Nietzsche semble avoir emprunté