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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/839

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ÉVANGILES CANONIQUES

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L’apôtre Matthieu était préposé à l’octroi de Capharnaiiin : or il semble bien que notre évangéliste témoigne d’une compétence assez spéciale en matière d’impôts, XVII, 24-26 ; XXII, 19, comparé à Marc, xii, 15 = Luc, XX, 2^.

D’autre part, la façon dont il parle de cet aj^ôtre tranche sur celle des autres évangélistes. — Dans le récit de son appel, tandis que saint Mai-c et saint Luc le désignent par le nom juif, qu’il avait dû porter tout d’abord, de Lévi lils d’Alphée, Marc, 11, ! = Litc, V, 27, notre auteur lui donne le nom de Matihieu{Bieudonné), qui servit sans doute à le désigner, après son appel par Jésus, dans le collège apostolique, et devint pour ainsi dire son nom chrétien. — Dans la liste des Douze, tandis que les autres Synoptiques, Marc, III, 'j : ^Luc, i, 15 nomment Matthieu avant Thomas, lui le place après et en rappelant expressément son ancienne qualité de publicain, X, 3. — Ces divergences, sans avoir rien de tendancieux (11° 118), semblent accuser une estime particulière de l'évangéliste pour le nom chrétien de l’apôtre, et comme une intention de rappeler la condescendance du Maître à son égard, par le souvenir de son ancienne profession. Elles ont bien leur meilleure explication dans le fait que l’apôtre et l'évangéliste sont le même personnage.

Conclusion. — En résumé, l’authenticité de l’Evangile de saint Mattliieu, bien que prêtant à des diflicultés spéciales et s’appuyant sur des arguments moins typiques que celle des deux autres Synoptiques, a néanmoins pour elle un ensemble de preuves, d’ordre externe et interne, d’une très sérieuse valeur.

Sans doute, on peut continuer à se demander quel rapport précis existe entre notre Evangile grec actuel et l’Evangile hébreu d’abord composé par l’aijôtre : en est-il une simple traduction, ou bien une édition remaniée et adaptée ? Et de quelle nature a été ce remaniement ou cette adaptation ? Mais, de l’examen du témoignage traditionnel et de l'étude directe du livre, il semble bien résulter que saint Matthieu est responsable de l'œu^Te délinitive comme de l'œuvre initiale, soit qu’il l’ait exécutée également lui-même, soit qu’il l’ait seulement couverte de son autorité, soit qu'à tout le iiioins on ait jugé dès l’origine le nouvel ouvrage essentiellement conforme à celui qu’il avait authentiquement publié.

134. Opinions des critiques. — Un grand nombre de critiques ne reconnaissent à notre premier Evangile ([u’unc authenticité partielle. Les nombreux partisans de la théorie des deux sources, en effet, le regardentcoinme une combinaison de l’Evangile de saint Marc avec un recueil primitif de Lugia. Or, d’après MM. Scumiedel et Loisy, tout ce qu’on pourrait admettre est que ce recueil de Logia, entré en composition de l’Evangile, dépendait peut-être d’un ancien document rédigé par saint Matthieu (n° 61, ISO). D’après le plus grand nombre cependant c’est le recueil de Logia lui-même quc l’apôtre aurait composé, de telle sorte qu’il faudrait reconnaître à notre Evangile une authenticité itartielle considérable, qui continue de lui assurer une grande valeiu' (n’SS, ISO). Nous avons vu que des critiques catlioliques très en vue se sont ralliés à cette théorie (n° S9, cf. 53 lin.) — L’authenticité subslanlielle du premier Evangile, avec les réserves faites i)lus haut sur la part jirise par saint Matthieu à la traduction de son Evangile araméen et le caractère d’adaptation que l’on doit reconnaître à cette traduction, est admise i)ar la majorité des critiques catholiques et par quelques protestants conservateurs, comme ] Th. Zaiin, Einleituiig in das N. T., t. II, 1900, p. 262 , sq. ; Das Evangeliuin des Matthæus, igo3.

135. A consulter. — Wallox, Cormîly, VigouRoux, Batiffol, Gondal, Jacquier, Brassac, op. cit., (n" 96) ; Fillion, E-angile selon saint Matthieu, 1878 ; Knaiîexbauer, Comment, in Eiangelium secuiidum Mattliæum, 1892 ; V. Rose, Evangile selon saint Matthieu, 1904 ; E. Mangenot, art. Matthieu (Evangile de S), dans le Dict. de la Bible, t. IV, 1908, col. 877880.

4. — L’auteur du IV Evangile, saint Jean I. D’après la critique externe

I. La tradition a la FI>f du ne SIÈCLE. — A la

lin du second siècle, toutes les Eglises tiennent le quatrième Evangile pour l'œuvre de l’apôtre Jean, le disciple bien aimé, qui l’aurait composé à Ephèse tl’Asie mineure, où il mourut, à un âge très avancé, sous le règne de Trajan,

136. i°En Occident. — TertulUen. — En Occident, en effet, Tertulliex attribvie notre Evangile, comme l’Apocalypse et la I"= Epitre johannique, à Jean, le disciple bien-aimé et apôtre du Seigneur : Adv. Praxeam, xv, xxi, xxiii, xxvi ; De carne Christi, m ; Adv. Marcion., IV, xxxv ; cf. III, viii, xxiv ; De præscript. hæret., xxii, xxvi ; Liber de anima, l. Nous savons comment ce même écrivain associe Jean à Matthieu, en déclarant que la foi a pour fondements principaux leurs deux Evangiles (11° 4).

Canon de Muratori. — Le Canon de Muratori montre le quatrième Evangile lu à Rome comme Evangile « de Jean d’entre les disciples », c’est-à-dire, à n’en pas douter, de Jean l’apôtre, « témoin oculaire et auditeur direct… des merveilles du Seigneui* » (no 6).

137. 2° En Orient. — Clément d’Alexandrie. — En Orient, mômes attestations. Clément d’Alexandrie cite notre Evangile, avec l’Apocalypse et la I" Epitre johannique, sous le nom de Jean : Pædagogus, I, vi ; Excerpta ex Theodoto, vi. Il s’agit incontestablement de l’apôtre : cf. Strom., Y, xi ; Excerpta ex Theodoto, xLi ; Quis dives salvetur, xlii. Dans sa notice sur les Evangiles, le même auteur, nous l’avons au, déclare que « Jean, le dernier de tous.., composa un Evangile spirituel ». Hypotjp., dans Eusèbe, //. E., VI, XIV (n° 3).

Théophile d’Antioche. — Théophile d’Antioche (180-1 85) allègue les premières paroles du quatrième Evangile, en les attribuant d’une façon toute naturelle à Jean : Ad Autolycum libri très, II, xxii. La manière dont il suppose ce personnage bien connu, comparée à tout l'état de la tradition asiatique à son époque, ne permet pas de douter que, pour lui aussi, il ne s’agisse de l’apôtre de ce nom.

Actes de Jean. — Les Actes de Jean (160-180), apocryphe gnostique, mettent en scène Jean l’apôtre. Or on le voit s’identifier avec le disciple bien-aimé, dont parle le quatrième Evangile, et s’approprier la conclusion de cet Evangile, xx, 30 et xxi, 26, comme s’il n'était autre que l'évangéliste lui-même. Lipsius-BonNKT, Actti apostolorum aporrypha. II" partie, 1898, t. I, p. 194, 195.

138. >. Irénée. — Saint Irénée, évêque de Lyon, mais originaire d’Asie Mineure et demeuré en relations étroites avec son pays d’origine, résume, pour ainsi dire, les deux traditions orientale et occidentale. Il cite fréquemment le quatrième Evangile, en le rapportant à « Jean, le disciple du Seigneur », qu’il api)elle aussi « l’apôtre » : Contra Ilæres., II, 11, 5 ; XXII, 3 ; III, viii, 3 ; xi, i, 9 ; xvi, 5 ; IV, 11, 3 ; vi, 1 ; X, 1 ; V, xviii, 2. Cf. I, IX, 3 ; II, xxii, 4j Lettre au