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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/934

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EXPERIENCE RELIGIEUSE

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l’aggravent, car plus le sentiment est intense et plus il est sentiment, ibid.

g] Expérience faite. — En matière de sentiment religieux et d’expérience religieuse, vous n’ignorez pas.., quelle prudence est nécessaire… V’ous le savez de votre usage des âmes, de celles surtout où le sentiment domine… de la lecture des ouvrages ascétiques…, n. 2107.

//} Contradiction. — Si ces expériences ont tant de valeur à leurs yeux, pourquoi ne reconnaissent-ils pas la même à celle que des milliers et des milliers de catholiques déclarent avoir sur leur compte â eux et qui les convainc qu’ils font fausse route… ? ibid.

i) Centre de Verreur. — La ti’ès grande majorité des hommes tient fermement et tiendra toujours que le sentiment et l’expérience seuls, sans être éclairés et guidés par la raison, ne conduisent pas à Dieu, ibid.

j) Conséquences alliées. — Que reste-t-il donc, sinon l’anéantissement de toute religion et l’athéisme.’… ibid., cf. 2082.

k) Evolution historique. — Le premier pas fut fait par le jirolestantisme, le second est fait 2)ar le modernisme, le prochain précipitera dans l’athéisme, n. 2109.

Les mots importants, que nous avons soulignés, donnent à entendre, que l’Eglise rejette toute thèse présentant l’expérience religieuse comme un moyen de connaissance religieuse e.rclusif ou prédominant, sans proscrire celles qui l’invoqueraient comme un facteur de connaissance important mais subordonné. L’explication de ces deux positions fera l’objet des paragraphes suivants :

IV. L’expérience religieuse ne peut être regardée comme critère exclusif ou principal. — Distinguons en deux classes les théories hétérodoxes et signalons les raisons principales qui les condamnent.

1° Protestantisme, Symbolo-fidéisme et modernisme, Pragmatisme de W. James.

A. Présupposés philosophiques inacceptables. — L’origine de ces thèses est en effet l’agnosticisme. Encore ne se contente-t-on pas de dire que l’intelligence ne peut pas connaître Dieu avec certitude ; au lieu de rester sur cette réserve, plusieurs de ces systèmes tendent vers le panthéisme et vers l’évolutionnisme, qui impliquent une affirmation précise sur l’être divin. Voiries articles Agnosticisme, Criticisme, Evolution, Panthéisme.

Une seule objection spéciale à cette étude, nous arrêtera ici.

On observe que « l’émotion interne » est « le premier nœud vital et organique, le principe d’où il faut partir pour suivre le dé^eloppement de la vie religieuse entière ». Sabatier, Esquisse, 1. III, c. ii, p. 268 ; que le sentiment est seul essentiel, la formule spéculative qui l’interprète une « surcroyance » dérivée et secondaire, W. James, Exp. relig., p. 420 sq. (angl. 504 sq.) ; que la religion étant affaire intime et individuelle, son critère doit être intérieur. Programma dei modernisti, p. 99.

Psychologiquement ces assertions sont inexactes ; logiquement elles sont injustifiées.

Prenons le cas tout semblable de l’amour humain. Un fils aime son père à proportion qu’il le connaît, comme bon, dès qu’il comprend ses bienfaits, comme prudent et vertueux, dès qu’il est capable d’apprécier ses actes. Les formules abstraites, paternité, bonté, prudence sont postérieures, mais la connaissance concrète de ces choses est antérieure à l’affection et en fournit la mesure : ce n’est pas l’affection qui est primitive, c’est la représentation de l’objet comme aimable.

Sans doute, puisque aimer est affaire personnelle, aucun amour n’est possible, avaîit que le cœur de chacun n’ait r » qu’il doit aimer, mais, à moins d’assi miler l’homme à l’animal, nul ne peut nier que l’intelligence ne doive régler l’amour, et qu’il n’y ait des affections légitimes et illégitimes, justiciables d’une logique non individuelle, mais uni-erselle.

Tout de même, point de devoir religieux, point de piété, pour chacun, avant que chacun n’ait compris cette obligation comme personnelle ; cela ne prouve pas que son seul fondement puisse être l’instinct avcugle ou une appréciation sentimentale sans contrôle.

Les conséquences d’un pareil principe suffiraient à ouvrir les yeux :

B. Conséquences de fait : a) d’ordre pratique. — Ces résultats lamentables, multiplication des schismes, excès de toute nature excusés par la double thèse de l’inspiration individuelle et de l’inutilité des œuvres, dès les premiers temps de la Réforme, provoquaient les regrets et les dégoûts des réformateurs. D0ELLINGER n’a fait que rassembler leurs témoignages, écrasants, La Réforme, 3 in-80, Paris, 1849-00.

De nos jours enfin, bien que les réveils’aboutissent plutôt à un relèvement de la moralité, on ne peut s’empêcher de leur reprocher ce qu’un journal anglais, lors du dernier, nommait « une débauche d’émotionalisme 2)j, cf. H. Bois, Le réveil au Pays de Galles, in-8°, Toulouse, s. d. (1906), p. b-o sq. Ils développent les cas de folie dans une proportion impressionnante, ibid, p. 5^5 sq.

W. James, qui convient de l’influence lâcheuse que peuvent avoir ses thèses pluralistiques^ sur le développement de la superstition, Aplural. universe, p. 315, découvre, qu’il le veuille ou non, les dangers plus graves de sa théorie du subconscient. Elle équivaut à une divinisation des émotions et des impulsions irraisonnées, sans espoir de remède. « Le crojant, dit-il, se sent en continuité… avec un moi plus grand d’où découlent en lui des expériences de salut. Ceux qui éprouvent ces expériences assez distinctes et assez fréquentes pour vivre à leur lumière, demeurent inébranlables aux critiques, de quelque côté qu’elles puissent surgir… fût-ce la voix de la logique du sens commun. Ils ont eu leur vision… » Ibid., p. 807 ; cf. E.rp. relig., p. 428 (angl. 508). M. H. Bois écrit de son côté : « L’irrésistibilité de ma croyance est le critère que j’ai de sa vérité. » Valeur de l’e.rp. relig., c. IV, p. 97. Quelles fantaisies et quels désordres ne peuvent invoquer pareilles visions et pareille irrésistibilité !

Ces auteurs pensent se justifier par deux observations : l’une que les excès ne peuvent prescrire contre l’usage, l’autre que les fruits utiles compensent largement les abus. — Ce n’est pas encore le commencement d’une excuse.

En effet, ces crises émotionnelles, avec leurs consé 1. Un reviral ou réveil est un renouveau de ferveur qui se produit dans quelque i-égion prolestante. On prêche, on prie dans un haut degré d’excitation, pour arriver à se sentir converti ou pour obtenir aux autres cette touche prétendue de la grâce.

2. Ces mouvements violents et désordonnés de « la grâce » ne sont pas sans occasionner dans les temples des dégâts matériels aj)préciables. Loughor, par exemple, patrie du leader Evan Roberts, ils s’élèvent à 1.500 fr. et le pasteur mécontent démissionne, op. cit., p. 572, note.

« Evan Roberts ne veut pas que celui qui se lève pour

prier [en public] sache ce qu’il va dire ; s’il le sait, ce n’est plus de la prière, car la prière est l’effusion des aspirations du cœur », p. 237. Le reste à l’avenant.

3. Dieu est fini et le monde est peuplé de moi surhumains qui nous enveloppent.

4. T/iey rcrnain quite unmoved bi/ criticistn, from n’hatever quarter it mai/ corne, be it académie or scientific, or be it merely t/ie vuice of logical commun sensé. They hâve had iheir vision…