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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 1.djvu/948

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1879

FAMILLE

1880

vieille thèse de son incapacité complète, de son infériorité absolue, est condamnée. La femme est replacée au rang qui lui est dû. parce qu’entre les époux il y a égalité de devoirs envers les enfants, il doit y avoir aussi égalité de droits et de situation sociale malgré leurs aptitudes différentes qui, précisément pour cela, se complètent. Tandis que les civilisations exclusivement masculines sont dures, sèches, fermées à toute tendance progressive, la civilisation chrétienne fait de la femme l’égale de l’homme en dignité : a Erunt duo in carne iina. »

En même temps, sans doute, le principe est posé de la subordination de l’épouse à son mari, « Vir caput mulieris : suh poieslate viri eris et ipse dominabitiir titi ». Mais cette subordination n’est nullement le résultat d’une infériorité, d’une incapacité féminine : elle tend à maintenir dans la vie commune l’unité de direction indispensable à toute société qui doit durer, et elle a des limites découlant tant du but qui l’a fait établir que des devoirs propres à la femme : celle-ci doit être consultée pour tous les actes graves concernant le ménage ; en l’absence du mari, elle doit agir librement ; si l’homme abuse de ses pouvoirs, elle a qualité pour protester et réclamer ses droits, La dignité de l’enfant n’est pas moins garantie : il ne faut pas oublier que, si l’enfant a des droits, à commencer par celui de vivre, il le doit au christianisme qui les a proclamés, parce que dans l’enfant il voit une personnalité morale, une créature faite à l’image de Dieu.

Le divorce a été solennellement condamné par Notre-Seigneur. « Ceux que Dieu a unis, l’homme ne les peut séparer. L’époux qui se remariera du vivant de son conjoint est un adultère. « A l’exemple de son chef et tout à l’opposé des doctrines païennes, hérétiques ou schismatiques, l’Eglise, personnifiée par le pape, a toujours proclamé l’indissolubilité du lien conjugal entre baptisés, même en cas d’adultère d’un époux, s’il y a eu union régulière, valide et corroborée par l’usage des droits qu’elle confère. La discipline ecclésiastique est particulièrement sévère quant au mariage, et pour la maintenir contre les attaques du libertinage, comme pour assurer la défense de l’ordre naturel et de la morale, la Papauté n’a jamais hésité à entrer en lutte avec les puissants de la terre, fût-ce au prix des plus cruels sacrifices : son attitude en face de Lothaire et de Philippe Auguste, d’Henri VIII d’Angleterre et des princes protestants d’Allemagne en fait suflisamment foi. Un pape ne peut pas, même pour sauver une nation, violer une loi divine.

Il est vrai qu’un mariage existant, mais non consommé en fait, peut être annulé : l’autorité ecclésiastique peut intervenir, en certains cas, pour briser le lien avant la consommation du mariage. D’autre part, l’acte conjugal ne saurait suppléer le lien inexistant, et la législation ecclésiastique consacre un certain nombre de causes de nullité déterminées. Mais, précisément, dans ces hypothèses il n’y a pas eu mariage et ce n’est pas un divorce que l’Eglise prononce. Sans doute aussi, l’indissolubilité d’une union mal assortie aura parfois de graves inconvénients auxcp.iels la simple séparation de corps n’apporte qu’un insuffisant palliatif. Mais, d’aliord, pour les misères humaines entre époux ayant la foi, le christianisme a des remèdes religieux : il morigène, redresse, frappe au tribunal de la conscience le coupable, tandis qu’à celui qui souffre il apprend à tirer parti de cette épreuA-e pour son perfectionnement et à la supporter chrétiennement. Aux instincts de la chair l’Eglise oppose les droits et la dignité de l’àme et elle n’hésite pas à faire prévaloir sur quelques intérêts individuels les intérêts supérieurs de l’ordre

moral et social. Le mariage, contrat-sacrement, comporte un engagement perpétuel, une aliénation définitive de liberté ; librement consentie, cette aliénation est conforme à la volonté divine, une saine philosophie la déclare parfaitement valable et sa nécessité dans l’intérêt de la famille et de la société tout entière devrait inspirer à l’utilitarisme le plus strict de la reconnaissance pour le christianisme qui l’a consacrée. Si les époux ne prétendaient s’unir que pour un temps, un tel contrat, aux yeux de l’Eglise, créerait, non le mariage, mais un simple concubinat, tiirpem et exitialem concubinatum, pour emprunter le mot prononcé par Pie IX, le 27 septembre 1862, au sujet du mariage purement civil : ce serait un acte absolument nul, n’entraînant aucune obligation de conscience.

3° Le christianisme donne à la famille sa vraie fin et la fonde sur le dé^’ouement. La fin véritable de la famille, école de perfectionnement mutuel, est de procréer des hommes, des serviteurs de Dieu, qui, par leurs vertus, se rendront utiles aux individus et à la société pendant leur vie pour devenir ensuite des élus. Les parents sont pour l’enfant, afin de le rendre vertueux et non pour qu’il les fasse heureux ; ils sont pour Dieu par l’enfant. Dès lors, la famille vit uniquement d’un dévouement et d’un sacrifice perpétuel de chaque génération à celle qui la suit et qui. sans cela, serait impossible ; son plus mortel ennemi est l’égoïsme sous toutes ses formes, même sous forme de tendresse. Or ce dénouement, nécessaire pour assurer la paix, l’union, la fécondité de la famille, toutes choses indispensables à la société elle-même, s’il est fondé sur l’amour naturel, n’est cependant pleinement garanti, avec toute son efficacité et sa durée, que par la foi religieuse : par elle, il est épuré et mis à toute épreuve. L’influence chrétienne dans la famille est le gardien de la vie humaine, non seulement de la vie présente, mais de la vie à venir : elle y combat l’égoïsme, dont le triomphe menacerait la perpétuité du groupe et même du genre humain.

En effet, par une des plus étranges prérogatives laissées par Dieu à l’homme, celui-ci détermine partiellement l’action créatrice, puisque de sa liberté dépend la multiplication des Aies et partant des âmes capables de connaître et de posséder Dieu. (3r l’égoïsme humain met obstacle à cette multiplication, car, s’il veut le plaisir, les jouissances, même dans le désordre, il recule devant les embarras et les charges de la paternité. De là le célibat immoral et l’infanticide, si fréquents dans les sociétés rebelles au sentiment religieux ; de là la stérilité volontaire des mariages, fléau social entre tous. Contre de telles pratiques le législateur humain est bien impuissant ; seule la loi divine est efficace auprès de qui l’écoute. Crescite et multiplicamini, prescrit Dieu qui veut la multiplication de l’espèce, le nombre, pour faire le plus possible d’heureux élus. Ainsi le christianisme sauA’egarde et peut seul sauvegarder la vie humaine. Il la protège d’ailleurs à un autre point de A-ue. L’égoïsme, quand il donne la Aie, la transmet trop souvcnt amoindrie, altérée par le contre-coup héréditaire de ses Aices. Contre lui, en créant et épurant les mœurs au contraire, le christianisme défend la Aigueur et l’intégrité de la Aie humaine.

Mais la naissance de l’enfant est le point de départ de son éducation^ œuvre de déAouement par excellence, A’éritable esclavage pour des parents conscients de leurs devoirs, car la tâche réclame une attention de presque tous les instants. Cette capti-AÙté semblera lourde à qui recherche les jouissances mondaines, et les parents égoïstes chercheront à s’en décharger. Ils confieront leurs enfants à des domestiques parfois ; d’autres fois, ce qui Aaut mieux certes