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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 2.djvu/435

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INQUISITION

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vous aurez à procéder contre eux suivant les statuts que nous avons réccninient promulgués contre les hérétiques. » (Cité par Vacandard, L’Inquisition^ p. 14 ;.)

D’Allemagne, l’inciuisilion s’étendit en Bohème, Hongrie, et jusque dans les pays slaves et Scandinaves ; quanta la Flandre et aux Pays-Bas, ils furent soumis, dos ia33, à l’action du grand inquisiteur de France Robert le Iîouc.re (voir Corpus documentorum inqiiisiliunis neeilanàicæ de FaEnFRici), t. I, pass.).

Ce rapide aperçu nous a prouvé que, de I2’25 à 12^0 environ, et plus particulièrement de 1239 à I23/|, la recherche des hérétiques et leur répression a été organisée d’un commun accord par le Saint-Siège, les évoques et les princes dans la chrétienté tout entière (à l’exception, semblet-il, de l’Angleterre), et que partout ont été établies les mêmes règles générales qui étaient contenues en germe dans les constitutions ilu ni’concile de Lalran de 11-9, de l’assemblée de Vérone de I184 et du IV’concile de Latran de I215. On peut les résumer ainsi :

i’La recherche des hérétiques était faite par les évêques, les légats ou leurs délégués ainsi que par les seigneurs et leurs baillis ;

2" Les suspects, dénoncés ou découverts par Vinquisitio, étaient examinés par le tribunal ecclésiastique de l’Ordinaire, du légat, ou de l’inquisiteur, qui pouvait leur infliger des peines spirituelles et des pénitences matérielles en vue de l’absolution ;

3" S’ils étaient reconnus coupables d’hérésie et indignes de pardon, ils étaient livrés à la justice séculière, qui leur infligeait les peines portées par le droit canon et par les ordonnances des princes.

Procédure de l’Inquisition. — La procédure in((uisitoriale nous est parfaitement connue, grâce aux nombreux documents qui nous la décrivent ou nous la montrent en action. Ce sont d’abord les bulles pontificales et les décisions des évêques, des légats, des conciles qui, au cours du xnr siècle, ont apporté des précisions de plus en plus grandes à cette institution. Grégoire IX, Boniface Vlll, Jean XXII tirent insérer le premier dans les Dccrétales, le second dans leSexte, le troisième dans les Clémentines les dispositions les plus importantes prises par leurs prédécesseurs ou par eux-mêmes pour la répression de l’hérésie. C’est ainsi que figurent dans les Dccrétales, le décret de Lucius III édicté à Vérone en 1184, celui par lequel Innocent III ordonna, en 1 igy.la conliscationdes biens des hérétiques, même si leurs lils étaient catholiques, celui du même pape qui déclarait infâmes et suspendait de leurs fonctions les avocats et notaires favorables aux hérétiques ou leur offrant leurs services (1205), enfin la constitution générale promulguée au l’concile de Latran(1215) et qui était déjà un code pénal abrégé contre les hérétiques (Carpiis juvis canonici, éd. Friedberg, II, p. 7’ ; 8-790. Décrétoles, V, titre vil). Le Sexte renferme 20 décisions de Grégoire IX, d’.LBXANDRii IV, d’I’KiiviN IV, de Clément IV, de BoNiFACE VIII, concernant la dégradation des eleres hérétiques, e consulamentiim des Cathares, les relaps, les abjurations, les pouvoirs des inquisiteurs, la confiscation desbiens, etc. (Corpus juris canonici, II, pp. 1069-1078 ; Se.rti decretalium, lib. V, tit. II). Les Clémentines nous donnent la constitution promulguée par Clément V au concile oecuménique de Vienne (1311), qui réglemente le pouvoir des inquisiteurs et la tenue de leurs prisons (Corpus juris canonici, H, pp. 1 181-1 iS^, lib. V, lit. m).

Les actes des conciles nous ont conservé les décisions que les évêques prirent dans leurs réunions provinciales pour lever certains doutes, résoudre cer taines diflîcultés qui surgissaient dans la procédure contre l’hérésie. Auconcile deNarbonne de 1235, par exemple (Labbe, Concilia, VII, 261) les évèipies du Languedoc, fixèrent des règles contenues en 29 articles. Le 21 stipulait que le prévenu ne réi)ondrait qu’à un seul juge et que celui-ci lui communiquerait toutes les charges pesant sur lui ; le 23= exigeait qu’une condamnation ne pût être portée qu’à la suite d’un aveu formel ou de preuves décisives ; car il valait mieux, disait-il, relâcher un coupable que condamner un innocent. En la^jô, à Béziers, les évêques de la même province se réunirent en concile sous la présidence de leur métropolitain Guillaume de la BiioUE, archevêque de Narbonne, et ils rédigèrent 37 articles relatifs à la procédure, a ijualiter sit in intjiiisilione procedeiiduni contra liereticos » (Lahbk, Concilia, VII, /tiî>-lf2’i). « Tempsde grâce rendu obligatoire, confessions reçues par les inquisiteurs, citation contre les prévenus, examen des hérétiques « parfaits et revêtus » avec le concours de personnes discrètes, bonté à l’égard de ceux qui se convertissent, retard dans le prononcé de la sentence pour amener les prévenus à se convertir et leur en donner le temps, situation juridique des héritiers du criminel mort avant sa réconciliation… cautions, pèlerinages, service en Terre sainte, tels furent les principaux points que le concile traita. « (Mgr Douais, Documents pour servira l’Iiisloire de l’Inquisition dans le Languedoc, l, p. 21). Beaucoup d’autres conciles légiférèrent ainsi en Languedoc, en Espagne, en F’rance et dans toute la chrétienté. Individuellement, les évêques publièrent parfois des consultations qui, sur tel point particulier de procédure, interprétaient les décisions des papes et des conciles. Tel fut le cas de Guillaume de la Broue, archevêque de Narbonne, répondant, le 1" octobre 12/(8, à des questions des inquisiteurs sur l’exhumation des hérétiquesmorls dans leurs erreurs (publiée par Mgr Douais, op. cit., I, p. lxix).

Enfin, |)lusieurs inquisiteurs ont rédigé pour leur usage et celui de leurs successeurs, des formulaires et des manuels qui indiquent la manière dont ils procédaient contre les hérétiques. Ces textes sont particulièrement précieux ; car ils nous viennent de ceux qui par profession connaissaient le mieux l’Inquisition et sa procédure, et (]uiles décrivaient d’après leur propre pratique. Le plus ancien de ces formulaires doit être daté entre 12^/1 et 126/1 et a été rédigé par deux dominicains inquisiteurs en Languedoc, Guillaume Kaymoni) et Pierre Durand, ou Bernard de Caux et Jean de Saint-Piebre. Il contient des formules de letties de citation collectives ou individuelles, d’abjuration avant l’interrogatoire, de réconciliation et depénilence pourlesconvertis, de sentence livrant riiéréti(]ue au bras séculier, de sentence contre ceux qui sont morts dans l’hérésie. Le tout se termine jiar un avertissement sur la nature des preuves admises et la conduite à tenir par les juges qui entendent ne s’écarler en rien de la ligne tracée par les constitutions apostoliques. » (Douais, op. cit., I, ccxxxiv.)

On peut ranger dans la même classe de documents un direidoire à l’usage des inquisiteurs aragonais qui fut préparé, en 12Îi-124^, dans une conférence que présida, à Barcelone, Pihiihe de Albalat, arche-A’éque de Tarragone et au])araant Frère Prêcheur ; il fut sans doute rédigé par S. U.*.imond de Pennafort, de l’ordre des Prêcheurs, pénitencier du pape Grégoire IX. L’un et l’autre de ces personnages n’étaient pas inquisiteurs délégués du Saint-Siège ; mais l’un, Pierre de Albalat, exerçait l’inquisition, en vertu de sa juridiction é|iisco]>ale et métropolitaine ; et l’autre, S. Rayinonil, avait contribué à l’introduire en Aragon ; d’ailleurs, comme canoniste du