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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 3.djvu/118

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MARIE.

IMMACULEE CONCEPTION

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elle sera, le temple que le Verbe divin a choisi de toute éternité, qu’il s’est construit lui-même et dès lors approprié ; c’est par là surtout qu’ils anticiperont, à leur manière, le dogme de l’Immaculée Conception, Une enquête détaillée ne convenant pas à la brièveté de cette étude, indiquons du moins les principaux anneaux de la chaîne, au commencement, au milieu et à la lin de la période.

I. Débuts de la période postéphésienne. — Voici, reliant en quelque sorte cette époque à celle qui l’a précédée, deux évêques qui Ogurèrent au concile d’Ephèse en adversaires décidés de Nestorius : saint Proclus et ïhéodote d’Anej’re.

Discii)le en sa jeunesse et ami de saint Jean Chrysostome, Proclus devint l’un de ses succès seurs sur le siège de Gonstantinople (434-446). Dans l’un de ses Eloges de Marie Mère de Dieu, il parle de « son âme pure et sans tache », puis, reprenant la comparaison de la seconde Eve, associée à son divin Fils dans la lutte contre l’ennemi du genre humain, il prête ce langage aux démons stupéfaits : « Aurons-nous donc à lutter contre une nouvelle Eve ? Devrons-nous livrer bataille à une femme immaculée ? Serons-nous obligés d’adorer le second Adam ? » L'éloge continue, renfermant des expressions comme celles-ci : « Sanctuaire sacré de l’impeccabilité, temple de Dieu sacro-saint, arche dorée à l’intérieur et à l’extérieur, sanctiliéc dans le corps et dans l'âme, épouse toute belle des Cantiques qui s’est dépouillée de la %-ieille tunique, globe céleste de la nouvelle création. » Orat, ti, i, 16, i-, P. G., LXV. ^51, 762 s., 766 s. Expressions d’autant plus signilicatives que l’orateur semble bien faire remonter la sainteté de Marie jusqu'à son origine, quand, à propos de l’inquiétude momentanée de saint Joseph, il fait cette remarque : « Il oubliait qu’elle pouvait devenir le temple de Dieu, celle qui avait été formée d’un limon pur, r, ix toû i.yy.Oii' (al. zaSypsû)-iT : i'/.- ! ij.i-)r, Trj.vj. Il ne savait pas que de ce paradis virginal, les mains immaculées du Seigneur devaient façonner le second Adam. » Ibid., 2, col. 733. Si l’authenticité de ce discours est contestée par maints critiques, d’autres la maintiennent et répondent aux objections. Voir M. Jugib, dans Noire-Dante, t. II, p. 226.

Théodotb, évêque d’Ancyre (430-439), n’est pas un témoin inférieur à Proclus. Traitant du mj-stère de l’Incarnation, il commence par rappeler la chute originelle et ses tristes conséquences, en particulier l’assujettissement de toute àme au démon, personne ne pouvant arrêter « la propagation du vice » héréditaire ; seul le Rédempteur est capable d’apporter le remède. Mais l’Eve nouvelle apparaît à côté du nouvel Adam. L’orateur ne la considère pas seulement dans son rôle actif au jour de l’Annonciation ; il la considère encore et surtout en elle-même, dans les perfections qui lui conviennent et dans la préparation lointaine que sa future mission suppose : « A la place de la vierge Eve, devenue pour nous un instrument de mort, Dieu choisit, pour nous i-edonner la vie, une Vierge très agréable à ses yeux et pleine de grâce ; vierge qui appartient au sexe féminin, mais sans en connaître la malice ; vierge innocente, sans tache, exempte de toute faute, intacte, pure, sainte d'âme et de corps, poussant comme un lis au milieu des épines, ignorant les maux d’Eve…, consacrée à Dieu dès le sein de sa mère, et, après sa naissance, présentée au temple en esprit de reconnaissance pour être élevée dans le sanctuaire, s’y instruisant de la loi, pénétrée de l’onction de l’Esprit-Saint, revêtue de la grâce divine ODuiræ d’im manteau, l’esprit rempli dune sagesse céleste et déjà, par le cœur, épouse de Dieu…

Telle est la femme, digne du Créateur, dont la divine Providence nous a fait présent et dont il a daigné se servir pour nous communiquer ses faveurs. »

Développant sa pensée, Théodote fait ainsi parler l’archange Gabriel, arrivé devant Marie : « C’est à cause de vous que la tristesse d’Eve a cessé ; c’est par vous que les maux ont pris Un, par vous qu’Eve a été rachetée, car saint est celui qui est né de la sainte, saint et Seigneur de tous les saints, saint et lui-même auteur de la sainteté ; c’est l’Excellent issu de l’excellente, l’Ineffable issu de l’ineffable, le « Fils du Très-haut » issu de la « trèshaute ». Hom., VI, In sanctam Mariam Dei geniiricem, 11-12, P. G., LXXVII, 1426 s. Quelle somme de perfections, la grâce initiale comprise, n’est pas supposée par un tel parallélisme d’appellations entre le nouvel.dam et la nouvelle Eve ? Le droit de restriction est d’autant moins légitime qne, dans un autre discours, l'évêque d’Ancyre est amené à nous présenter l’Eve ancienne et la nouvelle comme une œuvre divine dont l’auteur peut être ûer :

« Celui qui a formé l’antique Vierge tout à son

honneur, ôwfouTw ?, a formé aussi la seconde d’une façon irrépréhensible, my.uùuu :  ; s’il a doté l’extérieur de la beauté convenable, il n’a pas moins fait pour l’intérieur, où l'àme habite, en lui conférant l’ornement de la sainteté. ». Hom., iv, 5, col. iSgS. Que peut signilîer ce rapprochement, si ce n’est que, dans les deux cas, le terme de l’action divine productrice fut, naturellement et surnaturellement,

« digne du Créateur b et de ses desseins providentiels ?

2. tes derniers Pères grecs. — Trois personnages, appartenant à l'église syro-paleslinienne, méritent d’attirer l’attention aux vii^ et viii° siècles : les saints Sophrone, André de Crète et Jean Damascène. Des trois il est particulièrement vrai de dire que leur marialogie est en fonction de Vof/ix Simm :.

Saint Sophrone, patriarche dk Jiîbusalbm (634-638), est l’auteur certain d’une Lettre synodale à Sergius de Constantinople, et il semble être le même que Sophrone le Sophiste, auquel on attribue plus communément Vkomélie sur l’Annonciation. Préoccupé dans les deux écrits de défendre contre les arabes et les monothélites la divinité de Jésus-Christ et l’intégrité parfaite des deux natures, il prend un point d’appui dans le double mj’stère de la virginité et de la maternité. Sa doctrine marialogi([ue revient à mettre en relief une mystérieuse réciprocité de services et de grâces entre le Verbe incarné et sa Mère. Par son enfantement virginal, Marie rend un éclatant témoignage à la divinité de son Fils ; par sa qualité de ©e^tws : , comme Mère du Dieu fait homme, elle rend aussi témoignage à la dualité des natures dans le Christ. Orat. 11, In Annunliat, 44. P- G., LXXXVII, 3276 : cf. Orat.i. fn Christi nataliiia, Ihid., col. 3208. En retour, le Verbe a exalté sa Mère, en voulant qu’elle eut sa place auprès de lui dans l'économie de la rédemption ; c’est l’idée antique du second Adam et de la seconde Eve. Orat., 11, 14-16. 23, 25, 33, col. 323 1 s., 324a s., 3246, 3269..Mais, à la différence de la plupart de ses devanciers, Sophrone s’arrête moins aux harmonies providentielles de ce plan de revanche, qu'à la dignité, la sainteté, la pureté qui s’en suivent dans la mère de Dieu, rendue digne de son rôle par des prérogatives exceptionnelles, ri là Osapùj h rx-n xTiTT^f ; - « tso/.juktk, Ibid. 31, col. 3341> en particulier par une plénitude de grâce et une pureté incomparables : « Voilà pourquoi une vierge sainte est choisie ; elle est sanctiliéc dans son àme et dans son corps, et parce qu’elle est pure, chaste et immaculée, elle coopère à l’incarnation du Créateur. » Epist.synod., col. 3162.