Aller au contenu

Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 3.djvu/580

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

1147

ORDINATION

1148

être dédoublée : tel auteur cité en faveur de cette solution parle bien, et parle exclusivement, de l’imposition des mains, mais il a en vue la seconde cl non la première. El parmi les autorités les plus anciennes invoquées en faveur de cette dernière solution, quelques-unes pourraient, avec non moins de raison, être invoquées en faveur de la pr<-niière : tel parait être le cas de saint Bonaventure et surtout de Fieire de Tarentaise. Sans nous attarder à ces détails, venons à la partie constructive du mémoire.

II. Enquête historique. — L’Ecriture, les Pères, les décrets du Souverain Pontife, les documents conciliaires, la liturgie de l’Eglise, toutes les sources de la croyance catholique y sonlpasséesen revuepar le cardinal Vun Rossum.

L’Evangile autorise des conjectures sur le rite auquel le Christ voulut attacher la vertu de consacrer les prêtres de la Loi nouvelle ; mais ni dans l’institution de l’Eucharistie ni dans l’apparition où le Seigneur ressuscité conimuniqueà ses Apôtres le [>ouvoir de remettre les péchés, nous ne trouvons à cet égard un enseignement direct. Plus instructif est le récit des.ctes des Apôtres, où nous voyons des diacres, des prêtres, des évéqnes consacrés par rimp(isition des mains (Ad., vi, 6 ; xiv, 23 ; xni. A). Saint Paul conlirme ces données en invitant son disciple Timothée à réveiller en lui le charisme qu’il a reçu par l’imposition des mains du collège sæerdotal (/ /ïm., IV, 14 ; cf. // Tim., i, 6), en lui recommandant la prudence dans le choix de ceux que lui-même consacre au service du sanctuaire par l’imposition des mains (/ Jim., v, la). Là nous voyons à l'œuvre ceux que le Seigneur avait constitués dispensateurs du charisme sacerdotal ; cet exemple est une révélation de rinslitution faite par le Maître.

Ainsi l’ont compris tous les Pères qui rappellent le rôle de ce geste traditionnel dans la transmission du sacerdoce chrétien. On peut, à cet égard, consulter le mémoire d’un savant anglican qui vient de reviser avec un soin minutieux la tradition primitive de l’Ordination : W. H. Frkrb, Eurly form of Ordination, dans lissars on the earlr Hislury ofthe Chiirch and Ihe Min'-try, edited by H. B. Swete, Lomlres, ig18. L’enquête est toute favorable aux conclusions du cardinal.

Le langage du pape saint Corneille et de saint Cyprien évêque de Capthage, au milieu du m' siècle, est, à cet égard, particulièrement expressif. Au i', les noms se présentent en foule : Eusèbe de Cé^arée pour la Syrie, saint Sérapion de Tlimuis, saint Timo-Ihée d'.-Vlexandrie, le patriarche Théophile pour l’Egypte ; saint Ephreni pour la Mésopotamie ; saint Basile, saint Grégoire de Nazianze, saint Grégoire de Nysse, pour l'-Vsie mineure, les recueils des Constitutions apostoliques et des Canons apostoliques pour les E^'lises d’Orient, l’Amlirosiastre et saint Optât de Milêve par l’Eglise latine. N'épuisons pas l'énumération que le cardinal ^an Rossum poursuit consciencieusement jusqu’au ix » iècle ; mais observons avec lui que ces témoignages établissent deux choses : les Pères connaissent un rite d’ordination sacerdotale qui est l’imposition des miins accompagnée d’une prière ; ils n’en connaissent pas d’autre. On pourra, ici encore, contester quelques traits, se refuser quelquefois à reconnaître le sacrement de l’Ordre, là où le cardinal a cru le trouver. Mais qu’importe que tel texie delà P’dnchè ou de Clément d’Alexandrie puisse s’entendre du choix des clercs plutôt que de leur consécration par l'évêque ; fiue tel texte de Tertullien s’applique aussi bien, sinon mieux, à l’imposition des mains de la conlirmation OU de la pénitence ? La démonstration vaut par sa

masse ; et la masse ne serait pas ébranlée par l’abandon de quelques témoijjnages. i.)ans la mesure où ils témoignent du rite de l’ordination, les Pères sont unanimes à reconnaître l’imposition des mains.

L’examen des textes conciliaires ne conduit pas à une autre conclusion. Les conciles d’Ancyre, de Micée, d’Antioche au iv" siècle, celui de Chalcédoine au v », les ^ttitutii £cilr’suie anliqua qui, au v* et au VI' siècle, résumaient l'œuvre disciplinaire des conciles occidentaux, le ii’concile de Séville et le iv* concile deïoléde au vii' siècle, le ii" concile œcuménique de.Nicée au vin", le concile de Meaux au ix', au XVI* siècle les conciles de Cologne, de Wayence et celui de Trente dans son décret sur rextrènie-onction, peuvent être cités comme témoins d’une pensée invariable qui rattache au geste de l’imposition des mains la collation du pouvoir d’Ordre. Pour rendre raison de l’exception unique présentée parle Décret de Florence, Bellarmin s’est vn amené à plaider, contre toute vraisemblance, que le concile ne s’est pas proposé d’assigner la matière complète du sacrement, mais seulement une partie.

Le témoignage des livres liturgiques de l’Eglise, d’Oiient est ici, évidemment, d’un grand poiiis.,

Etudiant la tradition liturgique de l’Orient chrétien, Benoit XIV, au milieu du xviii* siècle, rappelait qu’on y distingue quatre rites trile grec, nie arméjiien, rite syriaque et rite copte : quatre courants sortis d’une même source primitive. Leurs monuments liturgiques sont aujourd’hui plus complètement publiés, plus parfaitement étudiés qu’ils ne le furent jamais. On peut y puiser des informations exactes.

Le rite grec n’a jamais connu, il ne connaît encore aujourd’hui aucune tradition des instruments dans l’ordination sacerdotale.

Très particulière est la condition du rite arménien. Dépourvu d’originalité, il emprunte de toutes mains, à l’Orient et à l’Occident, les cérémonies propres à rehausser la splendeur du culte. Dans ce vaste (lorilège liturgique, la tradition des instruments de l’Ordre a trouvé place, à côté de l’imposition des mains : tradition du livre des évangiles au diacre, tradition de la patène et du calice au piètre, imposition du livre des évangiles sur les épaules de l'évêque, font paitie d’un cérémonial compliqué, où le consécrateurraulti|dieles impositions des maina et les prières. On y reconnaît aisément des rites adventices ; l’histoire jette quelque jour sur leur introiluclion. En 1 année i.i, '|i, les.arméniens, opprimés par les Sarrasins, avaient cherché un appui en Occident. En accueillant leurs députés, le pape Benoit XII mita l’octroi d’un secours elTectif une condition préalable : 1 Eglisearménienne répudierait de graves erreurs dogmatiques auxquelles elle demeurait attachée depuis îles siècles, et se rapprocherait de la liturgie romaine.

Un concile arménien, réuni l’année suivante à Sis et groupant, autour du patriarche Mechitar, six archevêques, vingt-deux évéques, nombre d’abbés de monastères, examina les remontrances du pape L’une d’elles visait le rituel de l’ordination : Benoit XII rrprocliait à l’Eglise arménienne de conférer le sacrement de l’Ordre par le rite uniforme de l’imposition des mains, accompagné d’une simple prière où était spccitié l’ordre à conférer : diaconat, presbylérat, épiscopat. Il lui fut répomiu que 1 Eglise arménienne connaissait dè-i lors et pratiquait le rite de la tradition de-i instruments (lour les divers ordres ; qu’elle l’avait reçu, environ deux cents ans plus tôt, de l’Eglise riinaine et l’observait facilement. Celle réponse lixe au milieu du xii" siècle l’introduction de ce rite occidental dans le rituel arménien. Avant cette