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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 3.djvu/62

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MARIAGE ET DIVORCE

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l’administration de la justice ecclésiastique est plus économique que celle de la justice civile. D’ailleurs, que les avocats soient plus ou moins empressés ou habiles, cela n’a qu’une très médiocre influence sur le résultat final du procès. Le tribunal est trop averti et trop incrédule, ou, si l’on veut, trop critique, pour s’en laisser imposer.

Entin les causes matrimoniales sont, comme on dit, des causes fa^’orables : dans le doute, on doit toujours admettre la validité du mariage ; il faut, pour prononcer une sentence de nullité, une vraie certitude.

La seule catégorie de causes qui atteigne le lien conjugal existant, c’est celle des ruptures de mariage valide, mais non consommé. Ces causes sont toutes déférées à Rome, parce que le Souverain Pontife accorde ces dispenses, de son autorité suprême. D’après une statistique prise à Rome même, pour les dernières années, la moyenne annuelle des causes soumises à la Congrégation des Sacrements, pour l’univers entier, atteint la centaine environ. Or, en 1910, cinquante et une sentences ont été rendues. Sur ce chiffre, il y a eu 38 dispenses accordées, 6 ont été refusées, parce que la non-consommation n’était pas assez établie ; 9 causes ont été dilTérées pour supplément d’informations. Sur les 38 cas de dispenses, quatre fois on a défendu à l’un des conjoints de se remarier sans permission, parce qu’il y avait soupçon grave d’impuissance absolue ou relative.

Il est juste en elTet d’observer que souvent on recourt à la dispense super non consummaio, parce que l’impuissance n’est pas assez nettement prouvée pour que l’on puisse en conscience prononcer la nullité. Malheureusement les cas d’impuissance dont le vice est la cause deviennent tous les jours plus fréquents.

b) Frais de dispenses. — Les reproches adressés à l’Eglise portent, pour une large part, sur les taxes exigées des futurs époux, quand ils demandent dispense de quelque empêchement qui s’oppose à leur mariage. La meilleure réponse, ce sont les faits et les chiffres. Voici les tarifs anciens, tels qu’ils subsistent encore après la Const. Sapienti consilio (29 juin 1908). Et d’abord, un mot sur les diverses catégories de taxes.

a) La composition (compositio ou componenda) est une somme d’argent payable pour être employée en bonnes œuvres, à l’occasion des dispenses, et établie d’après des règles fixes. La composition a parfois le caractère d’une peine ou amende, imposée pour la faute qui a occasionné la demande de dispense. Plus souvent, elle est une aumône destinée à une bonne œuvre, et nullement au profit personnel du supérieur qui dispense. Elle peut aussi avoir pour but de suppléer à l’insuffisance des motifs allégués. Si elle avait, en outre, le résultat, sans nuire aux cas dignes d’intérêt, de diminuer le nombre des demandeurs qui invoquent trop aisément des faveurs contraires à la loi, qui pourrait s’en plaindre ?

; 3) La taxe est une somme à verser pour les honoraires

des employés et les frais de chancellerie.

v) Des frais supplémentaires sont dus d’ordinaire pour les dépenses postales et pour Vagent, si on recourt à un intermédiaire, en vue de procurer à Rome l’expédition de l’affaire.

Voici maintenant les chiffres, établis d’après les diverses catégories de demandeurs :

|0) Pour les indigents, on n’exige ni composition ni taxe. La dispense est gratuite.

a") Pour les paui’res (icre pauperes), pas de composition à verser, mais seulement une taxe de 30, ao francs, ou moins encore,

3") Pour les gens de médiocre condition (fere

pauperes), à la taxe des pauvres on ajoute une composition de 10 francs.

4") Pour les riches, taxe et composition sont variables, en principe, d’après la nature des empêchements et les richesses. En pratique, on accepte ce que lesévêques croient pouvoir demandera la bonne volonté de leurs diocésains, 100, 50, 25 francs, ou moins encore.

Tels sont les tarifs officiels pour les dispenses au for externe, accordées autrefois par la Daterie, aujourd’hui par la Congrégation des Sacrements.

La Péniteneerie, qui avait et qui garde les dispenses pour le for interne, ne demande ni composition ni taxe. Si on emploie l’intermédiaire d’un agent, ses honoraires sont de 3 francs, ou moins, ou même nuls. Pour les pauvres, on n’exige pas même les frais de poste.

La Propagande accordait gratis à ses sujets les dispenses demandées ; étaient seuls à couvrir les frais de poste.

Le S. Office dispensait sans imposer aucune composition ; il se contentait d’une taxe de 9 francs pour frais de chancellerie. Aucune taxe n’était demandée aux indigents. L’agent, si on recourait à lui, pouvait réclamer 5 francs.

Les tarifs existent dans les règlements, mais la pratique reste dejiuis longtemps, ou depuis toujours, en dessous des règlements écrits. En réalité, il est fort rare que le plein tarif soit acquitté. Les évêques indiquent eux-mêmes ce que la bonne volonté de leurs fidèles peut suj)porler. Les olh-andes libres (iifferte), faites par des personnes riches, s’élèvent souvent au total de 16, 10 francs. En cas de refus ou de mauvaise volonté, tous frais sont supprimés et l’évcché acquitte les frais de poste. Assurément, peu de gouvernements civils se montrent aussi accommodants dans la perception des impôts. [Sur les dispenses en général, voir l’art. Dispenses.]

c) Le congrès. — Le congrès est un abus réel, auquel a donné lieu une nécessité indépendante de la volonté de l’Eglise : la nécessité de constater l’impuissance d’un conjoint, avant de prononcer la nullité du mariage. Il y a impuissance lorsqu’un des conjoints, pour des raisons qui tiennent généralement à un vice organique, est incapable d’exercer les actes essentiels du mariage. En cas d’impuissance antérieure au mariage et perpétuelle, l’objet du contrat faisant défaut, le mariage est nul de plein droit naturel.

La justice et la moralité exigent que déclaration authentique soit donnée de la nullité, afin que la partie non impuissante soit libérée d’une vie de seule apparence conjugale, et puisse contracter un vrai mariage. Mais une telle déclaration n’est faite à bon escient que sur preuve de la non-consommation et de l’incapacité de consommer le mariage. De là la nécessité d’une enquête, apte à obtenir une preuve. décisive. Cette enquête, d’après les dispositions du droit commun ecclésiastique, comprenait : 1° le témoignage juré des conjoints ; a" la déposition, sous la foi du serment, de divers témoins, les uns rapportant ce qu’ils savent de la non-consommation ou de l’impuissance, les autres — testes credulilatis i’el septimæ manus — se portant garants de la créance due aux dires des époux ; 3° un examen de la conformation et de l’état des organes de l’un, ou des deux mariés. Selon le droit canonique, le mari doit être examiné par deux médecins ; la femme, par deux matrones ou sages-femmes, habiles et honorables. Le juge ecclésiastique n’intervient que pour choisir les médecins et les matrones, et pour prononcer sa sentence, d’après les rapports qui lui sont présentés. C’est à peu près le rôle des juges civils