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Page:Adhémar d'Alès - Dictionnaire apologétique de la foi catholique, 1909, Tome 4.djvu/40

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POSSESSION DIABOLIQUE

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i° — Il nous sullira de rappeler sommairement les différents Iraitscontenus dans lestextes indiqués, pour montrer à l'évidence qu’il y est question de l’intervention des démons, des esprits malins, et que cette intervention est bien la possession. Ces textes, en effet, nous disent que les démons, un ou plusieurs, occupent le corps de l’homme et y habitent, comme dans une maison, qu’ils reprennent de force, si possible, quand ils en ont été chassés ; qu’ils font violence aux membres, causent différents accidents et maladies ; qu’ils parlent par la bouche du possédé, de choses dont celui-ci ne peut avoir l’idée, qu’ils reconnaissent Jésus comme le Fils de Dieu ; qu’ils demandent à ne pas être envoyés dans l’abîme, mais à pouvoir entrer dans un troupeau de porcs ; qu’ils montrent visiblement leur sortie du corps du possédé en précipitant les porcs dans les eaux, chassés par un seul mot de Jésus, ou par son seul nom. Voilà autant de signes de possession, les uns équivoques, les autres certains. Mais de plus, les évangélistes, même quand ils ne donnent pas de signes certains de possession, allinuent clairement et constamment qu’il s’agit de vrais possédés, ils les appellent : habenles dæmonium, spiritum immundum. Jésus interroge le démon, qui répond en donnant son nom et non pas le nom du possédé ; il menace les démons, les fait taire, les chasse et leur défend de rentrer dans le possédé délivré. Non seulement en public, mais en secret à ses disciples, il déclare que c’est bien le démon qui possède ; c’est Satan qu’il voit tomber du ciel, quand les possédés sont guéris par les apôtres ; c’est Satan qui serait divisé contre lui-même, si c'était par Béelzébub que le Sauveur chasse le démon.

Il donne à ses apôtres et à ses disciples le pouvoir sur tous les démons et la mission de chasser les esprits immondes. Les disciples et les apôtres exercent ce pouvoir ; ils se réjouissent de voir même les esprits leur être soumis ; quand une fois ils ne réussissent pas, Jésus leur explique la cause de leur insuccès ; c’est qu’ils n’ont pas assez de foi, c’est que cette espèce de démon ne peut être expulsée que par l’oraison et le jeûne. Quand lesJuifs l’accusent d'être démoniaque, ou de chasser les dénions par Béelzébub, quoi de plus facile que de répondre : Misérables ignorants, il n’y a pas de démon, si ce n’est dans votre superstitieuse imagination. Est-ce ainsi que répond le Sauveur ? Bien au contraire : il allume n'être pas possédé dudémon, et il condamne comme coupables du péché de blasphème contre l’Esprit de Dieu, ceux qui osent lui attribuer d’avoir un esprit immonde. Il montre ensuite par des paraboles l’impossibilité de chasser le démon par le démon.

Que faut-il de plus, pour justifier notre interprétation ? Ajoutons cependant que les évangélistes distinguent expressément les démoniaques des simples malades. Dans l'énumération des bienfaits et des miracles de leur Maître, ils rapportent constamment comme deux choses différentes, la guérison des malades, et la délivrance des possédés : ceux-ci forment toujours une catégorie à part. Les apôtres reçoivent le pouvoir de chasser les démons et le pouvoir de guérir les malades. Il y a une mention distincte de l’exercice de l’un et de l’autre. Il est vrai qu’ils signalent aussi les maladies des possédés : nous avons vu précédemment que la possession n’exclut pas la maladie ; bien aucontraire, Iedémon, qui est l’esprit malfaisant, provoque soit directement soit indirectement les maladies, surtout les maladies mentales et nerveuses, en particulier, la paralysie, l'épilepsie, le mutisme, la surdité, la cécité, etc. Mais combien de malades dans le récit

évangélique sont guéris par Noire-Seigneur, chez lesquels il n’est pas question de possession, ni de démon, et, notons-le bien, des malades souffrantdes mêmes maladies que celles qui, en d’autres cas, sont attribuées par les évangélistes aux possédés ! En dehors des endroits nombreux cités plus haut, où la distinction des possédés d’avec les simples malades est clairement exprimée, nous pouvons ajouterdes exemples en grand nombre de paralytiques, boiteux, sourds, muets, aveugles, hydropiques, etc., à propos desquels il n’est pas question du tout de possession. (Ainsi Matth., ix, i ; Marc, ii, 3 ; Luc, v, 18 ; Mutth., ix, 37 ; xii, io ; Marc, iii, i ; Luc, vi, 6 ; Matth., xv, 30 ; Marc, vii, 3a ; vui, 22 ; Jean, ix, 1 ; Luc, xiv, 1 jxviii, 35 ; Marc, x, 46 ; Matth., xxviii, 29.) Nous voyons de même les apôtres, après l’ascension de Jésus-Christ, faire un nombre considérable de guérisons, relatées dans les Actes des Apôtres, et où il n’est pas question de démon. Mais nous y voyons aussi, entre autres exemples, saint Paul chasser le démon d’une femme pythonisse (Ad., xvi, 16). Nous ne voulons pas dire que cette femme fut possédée : probablement il existait un pacte entre elle et le démon, de manière que l’intervention du démon était une espèce de magie divinatoire, plutôt qu’une possession. Enfin, nous voyons des exorcistes juifs qui voulaient chasser les démons comme saint Paul, être maltraités par le possédé, dans lequel parlait le démon (Act., xix, 13-16).

a u — Après tout ce que nous venons de dire, la seconde proposition n’a pas besoin de preuve. Où serait la bonne foi des évangélistes, s’ils ne croyaient pas à la réalité de la possession, quand ils nous la décrivent de la manière que nous venons de rappeler ? Mais, dira-t-on, l’erreur de bonne foi n’est-elle pas possible ? Les évangélistes, tout en étant persuadés de l’existence du démon et despossédés, n’ontils pas pris pour des possédés, tels qu’ils se les imaginaient, ceux qui n'étaient en réalité que des malades ? Ils ont pu distinguer des malades communs d’avec les possédés ; mais n’ont-ils pas confondu avec la possession, les manifestations si singulières des névroses, en particulier de l’hystérie ? Nous répondons que tbute méprise de bonne foi est impossible. Qu’il suffise de rappeler que ces mêmes apôtres qui écrivirent les Évangiles, ou qui ont fourni les documents aux évangélistes, ont reçu le pouvoir de chasser les démons, et ont exercé eux-mêmes ce pouvoir. Rappelons encore qu’ils font parler Iedémon par la bouche du possédé, qu’ils le voient entrer dans les pourceaux, etc. Ou bien, il y eut de leur temps de vrais possédés, ou bien les évangélistes ne méritent aucune créance, ce sout des imposteurs. Et remarquons-le bien, il ne s’agit pas d’un seul évangéliste, ni d’un seul fait, ni de faits sans publicité ; mais tous les évangélistes sont d’accord, les faits sont nombreux, et se sont passés devant une foule de personnes. Les ennemis de JésusChrist eux-mêmes ne trouvent rien à nier, ils se contentent d’une mauvaise explication sur la manière de chasser les démons.

Les Evangiles étant authentiques, elles évangélistes de bonne foi, notre thèse, à savoir l’existence de véritables possédés, est prouvée d’une façon inéluctable.

Afin de dissiper toute ombre de difficulté, nous passerons encore en revue les objections principales des rationalistes et incrédules.

Pour être bref, nous en écouterons un seul, tristement célèbre, Ernkst Brnan. Il reproduit d’ailleurs les autres, et n’a pas le mérite de l’invention : c’est aux rêveurs allemands qu’il s’est adressé, surtout à Strauss, comme il le dit dans son Introduction