Page:Affaire des déportés de la Martinique, 1824.djvu/191

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été entendus, que les prévenus avaient été interrogés, et qu’enfin certaines formes de justice avaient été observées ; et bien, Monseigneur, tout cela est encore faux ; si des témoins avaient été entendus, les accusés en auraient eu connaissance, ils auraient dû être confrontés ; car qu’est-ce qu’un témoignage non contredit ?

Si les prévenus ont été interrogés, que l’on produise leurs interrogatoires ; mais on ne les produira pas ; car nous pouvons affirmer que, parmi les quarante-trois personnes déportées pour la France, Hyppolite Zenne, Jacques Cadet, et Charlery Desgrottes ont été les seuls qui aient été interrogés ; et comment l’ont-ils été ? les deux premiers dans la prison même (comme si c’était un lieu propre aux opérations de la justice), par le procureur du roi, qui n’était pas assisté de son greffier. La décision de la déportation était prise dès avant son interrogatoire, puisque le procureur du roi l’annonça même avant d’avoir terminé sa mission. Charlery Desgrottes fut interrogé au parquet de la Cour, par le procureur-général (M. Richard de Lucy) ; mais un procureur-général n’est pas un juge ; et il n’y avait pas de greffier assermenté pour tenir note des demandes et des réponses.

Voilà cependant, Monseigneur, comme on trompe votre religion et celle du roi ; voilà comme on se joue, dans les colonies, de l’honneur et de la liberté des citoyens !

C’en est assez sur les faits. S’il y avait inexactitude elle ne pourrait être rectifiée que dans un débat contradictoire ; combien, dans les affaires judiciaires, de faits de cette nature, recueillis dans l’instruction écrite, qui ne supportent pas le grand jour de la discussion, et que l’accusation est obligée d’abandonner ! Ce fameux complot dont on a effrayé V. E. et qu’on a mis en avant pour être déclaré le sauveur de la colonie, quand on en est en effet (avec intention