Page:Agassiz - Études sur les glaciers, 1840.djvu/188

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tres glaciers sous lesquels on pénètre bien plus loin. M. Hugi raconte avoir parcouru un espace de plus d’un quart de lieue carrée sous le glacier d’Uraz, près du Titlis. Les couloirs, de dimensions très-variables, avaient de deux jusqu’à douze pieds de haut[1]. Un Oberlandais, nommé Christian Bohrer, père du guide qui habite prés du glacier supérieur de Grindelwald, eut le malheur de tomber dans une crevasse de ce glacier ; bien qu’il eût eu un bras cassé dans la chute, il chercha cependant un moyen de sortir. Pour éviter de nouvelles chutes, il remonta un couloir qu’il aperçut près de lui sous le glacier, et au moyen d’efforts inouïs, il arriva, après trois heures d’angoisses et de luttes, au bord du glacier. Cette histoire a été rapportée en son temps dans beaucoup d’ouvrages et de journaux ; j’en ai causé plusieurs fois avec le fils du défunt, qui avait à cœur de redresser une erreur qui s’est glissée dans ce récit : tous, me disait-il, ont répété que mon père s’était sauvé en descendant le couloir, tandis qu’il le remonta. L’on comprend en effet que la tâche soit beaucoup plus dangereuse à la descente qu’à la montée ; car si l’on arrive à un endroit escarpé que l’obscurité empêche de distinguer, on doit nécessairement courir les plus grands dangers, tandis qu’en remontant, on peut espérer de le contourner ;

  1. Hugi, Naturhistorische Alpenreise, p. 261.