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premier dialogue.
DIOTIME.

Le génie n’est jamais loin. Il est présent partout, comme Dieu. Combien de fois ne l’ai-je pas éprouvé ! Qu’un spectacle inaccoutumé de la nature ou quelque événement soudain ébranle et trouble ma pensée, aussitôt, par je ne sais quelle évocation secrète, qui se fait en moi comme à mon insu, il me semble voir à mes côtés deux figures immortelles, deux génies lumineux, dont la seule présence fait rentrer en moi la paix, et en qui je vois toute chose se réfléchir, s’ordonner, s’éclairer, comme en un miroir magique.

ÉLIE.

Per speculum in enigmate. N’est-ce pas ainsi que parlait saint Paul ? Il y a longtemps, Diotime, que je vous soupçonnais d’être tant soit peu visionnaire !… Et ces deux génies sont Dante ?…

DIOTIME.

Dante et Gœthe.

ÉLIE.

Dante et Gœthe !… étrange association de noms !

DIOTIME.

Pourquoi étrange ?

ÉLIE.

Pourquoi ?… Parce que ce sont bien les deux