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HISTOIRE

Rollin. Enfin, comme le temps pressait et comme on pouvait craindre que la Chambre des députes, défendue par la troupe, ne prît une résolution énergique, également fâcheuse pour le National et pour la Réforme, M. Martin (de Strasbourg), qui n’avait cessé d’aller d’un comité à l’autre, dans l’intérêt commun, parvint à faire signer aux deux partis la liste suivante : MM. Arago (François), Dupont (de l’Eure). Ledru-Rollin, Flocon, Louis Blanc, Marie, Garnier-Pagès, Lamartine.

Sur ces entrefaites, la nouvelle positive de l’abdication du roi étant arrivée, M. Arago l’annonça au bataillon de la 2e légion qui stationnait dans la rue Lepelletier et à la masse populaire qui, depuis le matin, encombrait les abords des bureaux du National. « Le roi abdique en faveur de son petit-fils, dit M. Emmanuel Arago haranguant à une fenêtre, mais le peuple victorieux ne doit point accepter cette abdication. Un roi déchu n’a pas le droit de disposer de la souveraineté ; c’est au peuple seul, aujourd’hui, qu’il appartient de prononcer sur son sort ; c’est au peuple à constituer un gouvernement de son choix. » Et, voyant que ses paroles ne soulevaient aucune opposition, M. Arago proposa à l’acclamation populaire un gouvernement provisoire composé des noms qu’on vient de lire. Pendant ce temps, on décidait, dans les bureaux, d’envoyer une délégation à la Chambre des députés, afin d’y appuyer le mouvement révolutionnaire, et, peu d’instants après, MM. Arago, Chaix, Duméril et Sarrans prenaient tous quatre, à pied, le chemin du palais Bourbon.

Arrivés sur le boulevard, à la hauteur de la rue Duphot, ils aperçoivent un cortége composé de gardes nationaux, d’un petit nombre d’ouvriers, d’enfants surtout, qui entourent une voiture de place, et crient Vive la réforme ! Les délégués s’approchent et reconnaissent dans la voiture, MM. Odilon Barrot, Abattucci, Garnier-Pagès, Degouves-Denuncque sur le siége, auprès du cocher, M. Pagnerre, l’éditeur en renom de la presse démocratique. M. Arago s’a-