Page:Agoult - Histoire de la révolution de 1848, tome 1.djvu/426

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
410
HISTOIRE

Après ces premiers soins intimes, le nouveau ministre rédigea et fit partir sur-le-champ une circulaire fort courte, par laquelle il enjoignait aux agents diplomatiques de notifier aux différentes cours auprès desquelles ils étaient accrédités l’avènement de la République : « La forme républicaine du gouvernement, disait M. de Lamartine dans cette circulaire, n’a changé ni la place de la France en Europe, ni ses dispositions loyales et sincères à maintenir ses rapports de bonne harmonie avec les puissances qui voudront, comme elle, l’indépendance des nations et la paix du monde. Ce sera un bonheur pour moi, monsieur, de concourir par tous les moyens en mon pouvoir à cet accord des peuples dans leur dignité réciproque et à rappeler à l’Europe que le principe de paix et le principe de liberté sont nés le même jour en France. » Puis, rassemblant ses idées sur le rôle que la France allait avoir à jouer en Europe, M. de Lamartine composa plus à loisir, pour la soumettre au gouvernement provisoire, une seconde circulaire ou programme diplomatique auquel on donna le nom de Manifeste et qui porta bientôt à tous les souverains les assurances de bon vouloir et le salut pacifique de la République nouvelle.

Avant d’examiner ce document tant admiré d’abord, puis si violemment attaqué, avant de juger si la pensée de M. de Lamartine était, au moment où il l’exprimait, politique ou impolitique, il est nécessaire de jeter un coup d’œil sur l’état général de l’Europe, dans ses rapports avec la Révolution française et de préciser quelle était la situation de la France telle que l’avait faite le règne de Louis-Philippe.

Bien que cette situation fût, depuis 1830, un isolement observé avec défiance par les royautés légitimes, bien que la seule alliance formée par Louis-Philippe fût une alliance de famille, rompue de fait par la révolution de Février, bien que la proclamation de la République dût irriter et inquiéter au dernier point les maisons royales, cependant il n’y avait à redouter de leur part aucune coalition, aucune ten-