pays légal. Le Journal des Débats, fondé sous le Consulat par les frères Bertin, et qui devait une grande importance à la supériorité de sa rédaction littéraire, la Revue des Deux Mondes, où s’exerçaient à la polémique de jeunes écrivains chargés de louer les médiocrités en crédit et de rabaisser les renommées que soutenait un caractère incorruptible, étaient, le premier avec plus d’expérience et d’autorité, la seconde avec plus d’ardeur et de fantaisie, les organes accrédités de la politique conservatrice, de l’esprit libéral et universitaire. Écrire dans le Journal des Débats ou dans la Revue des Deux Mondes, c’était se créer un titre à toutes les faveurs et s’ouvrir toutes les carrières. Le Constitutionnel et la Presse avaient aussi, bien qu’à un moindre degré, leur part dans les largesses ministérielles. Quant au Siècle, sous l’influence des orateurs de ce que l’on nommait alors la gauche dynastique, il restait dans une mesure d’opposition tempérée qui portait peu d’ombrage et peu de préjudice au pouvoir.
Les journaux qui défendaient les intérêts populaires et l’esprit de la Révolution n’avaient qu’une publicité restreinte ; ils ne pouvaient se soutenir que par des sacrifices pécuniaires considérables et par une abnégation complète des plus légitimes ambitions chez quiconque leur prêtait le concours de sa plume.
Ainsi le pays légal et le gouvernement semblaient prendre à tâche de se préserver de toute vérité. Le roi ne nommait à la Chambre des pairs que ses créatures ; le corps électoral envoyait de préférence à la Chambre des députés des fonctionnaires publics ; les tribunaux ruinaient par des procès et des amendes la presse libre ;