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DE LA RÉVOLUTION DE 1848.

Les jours suivants des tentatives nouvelles furent faites au ministre des finances : l’une pour sommer M. Garnier-Pagès d’accorder des secours directs, l’autre, plus raisonnable, pour solliciter son intervention auprès de la Banque afin d’en obtenir pour les escomptes et les liquidations les plus grandes facilités possibles. La première de ces requêtes fut définitivement repoussée, mais la Banque ne refusa pas d’obtempérer en partie à la seconde. La création des comptoirs d’escompte, au moyen d’un prêt de 11 millions fait par le Trésor, vint bientôt parer aux dangers les plus imminents. En quelques jours, par les soins de MM. Pagnerre et Marrast qui en avaient été spécialement chargés, ils furent établis sur les points les plus menacés. Combinés avec l’établissement de magasins généraux où les industriels purent déposer les objets fabriqués, moyennant un récépissé sur lequel ; les comptoirs et la Banque firent des avances, et avec la réunion des banques des départements[1] à la Banque de France, ils fournirent au commerce, dans l’espace d’un an, un crédit de plus d’un milliard. Mais les résultats des meilleures opérations financières sont lents à obtenir, et le gouvernement n’avait le loisir de rien atten-

  1. Cette mesure, réclamée depuis longtemps par les économistes de l’école socialiste, ne fut point d’un effet aussi étendu ni aussi prompt qu’elle aurait dû l’être, par la raison que les banques n’existaient que dans un petit nombre de villes, et que le cours forcé des billets ne fut pas immédiatement décrété pour toute la France, mais seulement pour la circonscription du département où chaque banque avait son siège. L’unité des banques ne fut décrétée, sur la demande réitérée des directeurs des banques départementales que le 29 avril ; il fallut six mois pour que les billets de banques locales se transformassent en billets uniformes de la Banque de France. Pour généraliser et centraliser le crédit il eût fallu créer, en les reliant fortement entre elles avec la Banque, de France, des succursales de la Banque et des comptoirs d’escompte dans tous les départements avec les ressources combinées de l’État, des départements, des villes et des particuliers. Cependant, dans beaucoup de localités où le taux de l’argent s’élevait d’ordinaire à 12 ou 15 pour 100, les comptoirs d’escompte l’abaissèrent à 6. À la retraite du gouvernement provisoire 44 villes possédaient des comptoirs. Un crédit de 60 millions leur avait été promis par décret ; mais ils n’en touchèrent en réalité que 11.