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HISTOIRE

la politique jacobine, et le club communiste par lequel il se voyait traité de réactionnaire.

Les défiances en étaient venues à ce point, parmi les ouvriers qui fréquentaient ce club dirigé par un partisan de M. Blanqui, que, le 9 avril, ils se portèrent à la préfecture dans le dessein de s’en emparer et d’en chasser le commissaire ; mais M. Jolly avait été prévenu : La garde nationale, accourue à sa défense, eut aisément le dessus dans la lutte qui s’engagea, malgré l’extrême animation des ouvriers, parce que ceux-ci, au nombre de neuf cents environ, étaient très-mal armés et que leur chef se laissa prendre dès le commencement de la lutte. Le lendemain, le club communiste fut fermé, son journal suspendu ; la garde nationale vint féliciter le commissaire de la victoire que le parti de l’ordre, comme on disait déjà, avait remportée en sa personne.

Cette mesure, cependant, était beaucoup trop complète aux yeux de M. Jolly, car elle rendait aux royalistes, à la veille des élections, une force qu’ils n’avaient jamais perdue en réalité, mais dont ils avaient perdu le sentiment, et qui, par conséquent, leur était devenue inutile. M. Jolly crut donc devoir, sans plus tarder, combattre leur influence, et il s’attaqua, sans beaucoup de prudence, à l’un des hommes les plus considérables du parti orléaniste, M. Charles d’Arragon, qui devait à ses relations personnelles avec M. Garnier-Pagès sa nomination au commissariat d’Alby et le patronage presque officiel du gouvernement pour sa candidature. M. Jolly tenta d’autorité, sans aucun motif sérieux, presque sans prétexte, de révoquer M. d’Arragon ; il installa un avocat, nommé Boguel, à sa place ; mais la force morale de l’opinion publique l’emporta sur la volonté cependant très-énergique de M. Jolly. On écrivit de tous côtés, à Paris, pour protester contre la révocation de M. d’Arragon, et bientôt, à la grande surprise du commissaire, il se vit désavoué par M. Ledru-Rollin qui réintégra M. d’Arragon dans ses fonctions.