Page:Agoult - Histoire des commencements de la république des Pays-Bas - 1581-1625.djvu/138

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sure et lui explique que Guyon vient chercher un passe-port pour se rendre en France. Le repas terminé, comme le prince remontait dans ses appartements, Guyon, qui se tenait enveloppé dans son manteau, caché derrière un pilier, s’élance vers lui et lui tire à bout portant, dans le côté droit, un coup de pistolet chargé de trois balles. Guillaume, atteint au cœur, chancelle ; il s’affaisse, il tombe en s’écriant « Je suis blessé. Mon Dieu, aie pitié de moi et de ce pauvre peuple[1] » Ce furent ses dernières paroles. La princesse d’Orange et la comtesse de Schwartzbourg, accourues au bruit de la détonation, le trouvèrent sans voix et sans mouvement. L’un de ses serviteurs, qui l’avait relevé, le soutenait sur une marche de l’escalier on le porta à grand’peine dans la salle voisine. Là, sa sœur, qui comprit toute la gravité de sa blessure, lui ayant demandé en allemand « s’il ne recommandait pas son âme à Christ », il fit signe, il murmura que oui ; peu après, il rendit le dernier soupir.

L’assassin avait disparu. Il avait fui par les écuries vers le rempart auquel le couvent de Sainte-Agathe était adossé. Son chapeau et un pistolet qu’il laissa tomber mirent sur sa trace. Au moment où il allait s’élancer du haut du rempart dans le fossé pour se sauver à la nage, un laquais et un hallebardier du prince l’atteignent. « Traître d’enfer ! » s’écrient-ils en se saisis-

  1. Les historiens du temps disent que le prince d’Orange prononça ces paroles en français.