Page:Agoult - Lettres républicaines.djvu/142

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plus aujourd’hui à la défiance où les ont jetées des tentatives inconsidérées et à la fausse notion qu’elles ont conçue du devoir qu’aux rigueurs législatives de la tradition salique.

Ainsi, d’une part, révolte prématurée, tapageuse, déraisonnable ; de l’autre, consentement trop facile à la servitude morale, sacrifice de sa propre dignité, engourdissement volontaire, voilà ce qui perpétue le préjugé défavorable au sexe et le désaccord que chacun observe entre nos institutions et nos mœurs ; entre le mouvement progressif de l’État et l’esprit stationnaire de la famille, entre les principes proclamés à la tribune et les enseignements donnés au foyer.

Ô mes chères concitoyennes, ne sentez-vous donc point, dans la grande tourmente à laquelle nous sommes en proie, l’impérieux appel de la Providence à toutes les énergies de l’âme humaine ? Ne comprenez-vous pas que les vertus négatives de résignation et d’humilité ne suffisent plus au salut de la famille et de la patrie ? N’y a-t-il rien en vous qui vous sollicite d’élever vos cœurs et vos pensées au dessus des régions inférieures où vous végétez inutiles ? Votre âme ne sent-elle pas le besoin de se dilater par delà les étouffemens de l’égoïsme domestique, par delà surtout ce cercle étroit de la vie du monde, où s’usent, où se flétrissent en agitations si vaines, les forces et les grâces de votre jeunesse ?

Quand les plus graves problèmes se posent dans la conscience humaine, quand une lutte terrible s’engage entre le passé et l’avenir, pouvez-vous sans remords demeurer à l’écart, isolées dans votre ignorance et vos puérilités, bornant tout votre rôle à lamenter le temps qui s’écoule, les grandeurs qui passent, les plaisirs et les richesses qui fuient ?

Ah ! qu’il n’en soit pas ainsi ! Secouez votre torpeur : redressez vos courages. Rappelons-nous que l’histoire a dit des femmes de la Gaule qu’elles ne rivalisaient pas seulement avec les hommes par la grandeur de leur taille, mais qu’elles les égalaient par les forces de l’âme[1]. Ressaisissons,

  1. Diodore.