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L’ILLUSTRE MAURIN

Maurin en tête, sur leurs chevaux du golfe aux harnachements enrubannés.

Tous ces mousquetaires, ainsi que les nouveaux corps de bravade, sont armés non de mousquets mais de tromblons, formidables escopettes dont le canon s’évase comme le pavillon d’un cor de chasse, et que la ville de Saint-Étienne fabrique tout spécialement « pour la consommation de la ville de Saint-Tropez ».

De temps à autre, à l’ordre muet de la pique, les escopettes des gardes-saint se renversent sur les avant-bras, leurs énormes bouches obliquement braquées vers le sol. Un signal. Vingt tromblons chargés jusqu’à la gueule vomissent ensemble des éclairs et de la foudre.

À peine cette décharge a-t-elle retenti que celle d’un autre corps de bravade la suit… Déjà les premiers ont rechargé… et c’est un roulement continu de coups de feu, si nourris, tellement d’ensemble, qu’à chaque décharge on croirait entendre le coup unique d’un canon… de Titans !

Les bravadeurs suivent l’itinéraire tracé, et tous les dix pas s’arrêtent pour de nouvelles salves.

La fumée couvre la ville. L’odeur du salpêtre, mêlée à l’odeur de l’encens, enivre cette population tout entière. Tout le monde est aux fenêtres ou dans la rue.

La ville tremble, murs et pavés. Si un notable passe, ou un étranger à qui on veut faire honneur ou malice, sur un signal il est entouré par un corps de bravade qui forme autour de lui un cercle parfait. Il en est le centre avec quatre pas de rayon à peine ; les tromblons abaissés autour de lui n’attendent qu’un nouveau signe. Le tintamarre formidable de trente coups de tromblon partant ensemble retentit, rrran ! La terre semble s’en-